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Une résidence de très haute Nott, acte II

Dernier jour de résidence et nouveau marathon de l'Orchestre de Bamberg dans des monuments du répertoire. Donné en fin de matinée dans une salle toujours archi-comble, le premier programme de la journée rendait hommage à l'œuvre de Ligeti dont certaines partitions sont programmées dans le cadre du Festival Estival de Lucerne 2007.

est un grand connaisseur de ces partitions pour les avoir enregistré pour Teldec dans le cadre de son édition Ligeti. Le Lux Aeterna est presque un tube de la musique contemporaine depuis son utilisation dans le film 2001, l'odyssée de l'espace de Stanley Kubrick. Il n'empêche que l'audition d'une telle pièce reste un grand moment, d'autant plus quand cette musique était servie par les London Voices. Donné judicieusement dans sa version originale de 1913 (c'est-à-dire avec les bois par 5), le Sacre du Printemps bénéficia d'une réalisation de très haut vol. La direction de Nott évita tout spectaculaire au profit d'une logique et d'une puissance chorégraphique, mais le principal attrait de cette interprétation résidait dans le fini orchestral, les différents pupitres de vents étant particulièrement en verve sous l'impulsion du basson, de la flûte en sol et du cor anglais. Les cuivres quant à eux, étaient roboratifs et tranchants dans leurs attaques. Le dernier accord qui fait souvent l'effet d'un soufflet qui retombe fut ici explosif.

La seconde partie du concert était consacrée au Requiem de Ligeti, introduit par une pièce de , choix judicieux tant ce chef d'œuvre du compositeur hongrois est inspiré des polyphonies de la Renaissance. On ne dira jamais assez à quel point, l'audition de cette messe des morts est une expérience auditive unique qui soulève d'enthousiasme d'une salle de concert ! En effet ramassée en une petite demi-heure, cette musique compacte et éruptive fait forte impression. En quelques années, le chef anglais a mûri sa vision de l'œuvre. Abandonnant une posture plus intellectuelle que sensorielle, il impose une tension et une rage volcanique qui font de cette partition un magma dévastateur en fusion. Il hisse vers de vertigineux sommets ses musiciens, les London Voices et ses deux solistes. Emotionnellement et techniquement, ce concert était sans doute la clef de voûte de cette résidence.

En fin d'après midi et en guise d'apothéose finale, Nott et ses Bamberger Symphoniker offraient une version de concert de l'Or du Rhin avec une distribution germanophone des plus prometteuses. Il est particulièrement intéressant d'entendre en concert des opéras de Wagner car l'oreille se rend compte de nombreux détails de l'orchestration qui passent souvent inaperçus lors de représentations scéniques. Dans la lignée d'un Wagner dégraissé, Nott dirige rapidement tout en insistant sur la fluidité et les contrastes alors que les teintes de l'orchestre colorent avec luminosité cet opéra. Vieux routier du rôle de Wotan est Wotan engorgé et rocailleux mais sa connaissance des moindres recoins du rôle en fait tout de même un dieu de grande envergure. Il en va de même de , Mime éternel des scènes lyriques, qui compense ses défaillances vocales par son charisme scénique. Présenté il y a encore peu de temps comme une future gloire wagnérienne fait bien pâle figure avec son timbre passablement éraillé. Au rang des très bonnes prestations, il faut classer l'Alberich charpenté de l'expérimenté Franz-Joseph Kapellman, le Froh puissant et bien chantant de David Soar et un trio étincelant de filles du Rhin, le reste des chanteurs s'acquittant avec probité de leurs rôles.

La conclusion de cette résidence épique est indéniablement hautement positive : le niveau artistique était des plus élevé et le public a répondu fidèlement présent. Quant à , chef versatile capable de se fondre dans différents styles, il confirme sa stature de très grand chef.

Crédit photographique : © R. Haugthon

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