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Soleils baroques : Les lumières éclatantes de la Ville Eternelle

Alors que la culture dans son ensemble, et la musique en particulier, se trouvent aujourd'hui menacés par la disparition des subventions, le mécénat romain du XVIIe siècle a de quoi faire rêver.

Car c'est bien grâce au mécénat que la musique, comme tous les arts d'ailleurs, a connu un véritable âge d'or durant cette période et qu'aujourd'hui nous pouvons succomber à l'éblouissement de ces cantates que nous ont léguées et .

Rome au XVIIe siècle est un foyer musical à la vitalité rayonnante, où toutes les grandes familles très liées au Vatican et à la Contre-Réforme, s'enorgueillissaient de la gloire des artistes travaillant à leur service. La famille Barberini figure parmi ces grands mécènes qui employèrent les plus grands musiciens de l'époque comme Frescobaldi mais également Rossi et Marazzoli qui disputèrent sa gloire à Carissimi, et sont considérés comme les principaux compositeurs de cantates de cette époque. C'est Jean Lionnet, aujourd'hui disparu, qui attira l'attention de Jérôme Corréas sur leurs cantates qu'il avait redécouvertes dans les bibliothèques et archives romaines.

Regrouper autour de la thématique de la lumière, Soleils baroques, nous offre en reflet, une cantate sur un texte écrit par Giovanni Lotti la Predica del sole, traitée par Rossi et Marrazoli, nous montrant deux personnalités si profondément fortes et différentes.

Quête spirituelle pour Rossi dans sa composition, ses choix vocaux et instrumentaux, c'est une vision heureuse du monde et de sa perception que nous révèle sa Prédica del sole. Le soleil est basse, y est noble et éloquent. Marazzoli au contraire s'abandonne au désespoir, au doute, au scepticisme et le soleil y est ténor, sa voix plus « fragile » et amer, sa lumière plus torturée.

Dans toutes ces œuvres y compris les airs sur des textes profanes de Rossi, parlant des peines d'amour, la lumière que ce soit celle du soleil, de dieu (ou du christ) ou celle des yeux de l'être aimée, est miroir de l'âme. Elle porte, soutient les affects.

On peut regretter la photo de couverture du coffret, un peu trop contemporaine et trop crue ou froide dans sa lumière pour au fond évoquer ce qui fait la réussite de l'interprétation de ce programme, la vision de ces mille facettes de la lumière, céleste ou divine, fruit du feu extérieur ou intérieur, des voix et des instruments.

Rossi permet aux interprètes de se faire des petits plaisirs, bien perceptibles dans le dialogue des sopranos ( et Barbara Kusa) : dans Vorrei scoprirti un di, ou des ténors ( et ) et des instruments dans A chi vive ogn'hor contento. La basse continue permet plus encore aux interprètes de développer des couleurs si délicates et expressives dans les dissonances, de faire ressortir les oppositions, où cette part claire de l'être humain n'est jamais loin de cette ombre qui le suit partout. Le programme de ce Cd parvient à nous montrer cette musique du Caravage où la béatitude quête de Rossi devient déchirement dans les discordances de Marazzoli.

Il faudra plus d'une écoute pour découvrir toutes les subtilités de ces œuvres et le travail remarquable de ces interprètes. N'hésitez pas à découvrir à leur côté, ce répertoire.

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