- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Codex Caioni : La fête au village !

Codex Caioni a l'apparence d'un roman d'aventures, et Jean-Christophe Frisch lui – même nous en avait donné les clés il y a quelques mois. Et voici que la voix claire, lumineuse, presque apeurée de s'élève…

Rare sont les charmes qui opèrent aussi vite. Mais notre Lièvre de Dührer illustrant le livret, nous conte son histoire, sa fuite et ses peurs et cette flûte magique qui nous guidait dans Pellegrino, nous bouleverse, plainte douloureuse, si douce et si sensible…enlaçant le chant dans sa fuite éperdue.

Ayant vécu aux confins de la Transylvanie au XVIIe siècle, , connu une vie tourmentée dont le Codex qui porte son nom, est le reflet et dont XVIII-21 et Jean – Christophe Frisch, nous livre dans ce Cd les couleurs si multiples. Les interprètes de cet enregistrement nous mènent sur des routes que nul n'a empruntées depuis plusieurs générations, aux portes de l'Occident et de l'Orient, là où musique savante et musique populaire dansent encore du même rythme, aux confins des âmes.

Relatant une journée de mariage, ce Cd nous fait découvrir des danses virevoltantes comme Ötödik Tancs hatadon, Apar Lázár Tancza, Paikos Tancs, … et ses danseurs (qui accompagnent en concert ce programme), dont il nous semble entendre les cœurs palpitants.

La distribution vocale parfaitement équilibrée et multiculturelle, nous éblouit et nous fait succomber à l'infinie diversité du chant baroque, autre et fascinant. Le ténor dans O quales flores, a le timbre d'un ange charmeur, porteur de fleurs aux mille parfums du paradis tandis que la soprano , dans O Anima mea suspira donne à la prière la lueur de l'extase avec des aigus flamboyants, mais qui dans la mélopée du chant populaire Lupul Vaidane eneke viennent se briser en des dissonances rauques, abime de l'âme. Sa diction si travaillée lui permet de chanter en parfaite harmonie avec la mezzo roumaine Adriana Epstein, dont nous découvrons ici la douceur du timbre, rond et chaleureux. Enfin le beau timbre sombre et dramatique du baryton roumain Ion Dimieru lui permet lui permet de rendre sensible l'appel à la Miséricorde sacrée dans Misericordias et les provocations du Démon dans Dialogus.

La basse continue est envoutante, à l'image de la flûte de Jean – Christophe Frisch. Les percussions endiablées de Pierre Rigopoulos font vibrer mélopées et danses, tandis que les ornements de la guitare baroque de Rémi Cassaigne et du clavecin de Jean – Luc Ho, à la délicatesse si fluide, sont un havre de paix mélancolique et bouleversant. Les danses tournoyantes ont les couleurs vives et chamarrées du bratsch, des violons virtuoses roumains Mihail Ghiga, Kovács Lászlo, Adorján Csaba, Lázár Zsombar tandis qu' donne à la viole de gambe la mélancolie des voix humaines et vient se joindre aux musiciens roumains avec une facilité déconcertante à la kamancha.

Rare sont les programmes qui au disque sont si aboutis, celui-ci est une pure merveille. Fait pour le concert, il vous invite à venir danser avec les convives de cette noce hors du temps et lorsqu'il s'achève vous n'avez qu'un regret ne pas pouvoir vous lever pour applaudir ses interprètes.

(Visited 548 times, 1 visits today)