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Fraîcheur et vigueur inouïes pour Bach et Charpentier

Le Palais Royal

Des tubes du baroque, Te Deum de Charpentier et Magnificat de Bach, avec le non moins fameux choral Jesus que ma joie demeure en guise de sucrerie finale, telle pourrait être l'affiche idéale d'un concert dominical d'attrape touristes, en plein cœur de Paris. Or ce que nous avons entendu en l'Eglise St Roch jeudi soir fut bien plus qu'un simple divertissement fait de mélodies célèbres écriées à traits grossiers. Non, ce que nous avons entendu, c'est le fin résultat d'un travail réfléchi et consciencieux, avec de vrais artistes à la musicalité authentique, des musiciens sincères et investis qui ont donné le meilleur d'eux-mêmes pour atteindre des sommets. L'action de , fondateur et directeur du Palais Royal depuis 2001, est tout à fait remarquable, en ce sens qu'il parvient à extirper le meilleur de chaque chanteur pour offrir aux auditeurs une impressionnante homogénéité et une vraie qualité musicale. L'une des particularités de sa méthode est l'interprétation des œuvres sans partition, une exigence qui facilite naturellement la concentration mais surtout l'unité et la cohésion.

L'entame énergique et fracassante du Te Deum, avec les obligées timbales et trompettes, a de fait placé l'auditoire dans une ambiance versaillaise du XVIIe siècle, les couleurs précieuses des instruments d'époque se mêlant prodigieusement au rouge éclatant des tenues des chanteurs masculins. La première entrée du chœur, installé sur une seule ligne en demi-cercle autour de l'orchestre, semblait provenir d'un autre monde tellement la symbiose entre les voix respirait la pureté. La qualité des interventions solistes était relative à la qualité de l'acoustique de l'Eglise, franchement décevante avouons-le (beaucoup d'écho et peu de projection), mais il y eut tout de même des moments fort inoubliables (notamment le «te ergo quae sumus», chanté par ). Il nous faut cependant regretter une fugue finale jouée sur un rythme quelque peu apathique.

Le Magnificat de Bach, plus virtuose, mérite des louanges similaires, avec un point d'honneur à accorder au magnifique duo «Et misericordia», chanté par le haute-contre et la taille . Chœur et orchestre ont à nouveau affiché maîtrise et assurance, sous la baguette d'un pleinement dans son élément, qui a su donner à la partition beaucoup de relief, avec une insistance évidente sur le phrasé, les dynamiques et l'intonation.

Un concert pleinement réussi, qui démontre bien qu'il y a des manières moins académiques pour atteindre les cimes de la grande interprétation, sans nécessairement emboîter le pas aux célèbres ensembles tel le Chœur Arnold Schœnberg, les Arts Florissants ou The Monteverdi Choir…

Crédit photographique : © DR

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