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Satie, le bel excentrique

La personnalité peu ordinaire d', ses frasques et son goût de la provocation, sa vie solitaire ont souvent troublé la perception de sa musique. Un musicologue (aujourd'hui disparu !) le qualifia même de «petit maître». D'autant plus étonnant lorsqu'on sait que Debussy, Ravel, Poulenc et même John Cage lui vouèrent une admiration sans limites. remet les pendules à l'heure Satie, avec cet excellent album, Avant-dernières pensées.

Le premier disque, Solo, propose un florilège de pages connues et méconnues de Satie : Gnossiennes, Descriptions automatiques, Le piège de Méduse… Le piano d' y est éblouissant, tour à tour mélancolique ou coquin, majestueux ou malicieux. L'interprète joue parfaitement des transparences et des mystères de cette musique, si simple en apparence. Dans de nombreux entretiens, il a souvent avoué son admiration pour l'immense pianiste que fut Marcelle Meyer, évoquant la limpidité, la rectitude et la fluidité de ses interprétations : il lui rend ici un parfait hommage.

Pour Duos, le second disque, a invité , Eric Le Sage, et deux chanteurs, Juliette et Jean Delescluse. Ces deux derniers contribuent largement à la réussite du disque. Avec Ludions et le rare Allons-y Chochotte, Jean Delescluse ne cherche jamais à «faire lyrique», mais se glisse avec d'évidentes délices dans l'ambiance du «caf'conc» si chère à . La rencontre avec Juliette relève d'un petit miracle poétique. Elle apporte la couleur des chanteuses réalistes des années 1900 et sa version de Je te veux est un bijou !

Deux surprises vous attendent sur ces disques. L'une est révélée par Alexandre Tharaud : «Un oiseau solitaire chantait chaque jour dans la cour attenante à la petite église du Bon Secours. C'était un peu pénible au début, mais nous avons pris l'habitude d'enregistrer avec lui. Nous avons choisi de le garder. Comme un écho à l'extrême solitude de Satie, vous l'entendrez peut-être au recoin de certaines prises.» L'autre surprise est dissimulée à la fin de la dernière plage du deuxième CD, la mélodie Allons-y Chochotte… Cette plage dure cinq minutes et 48 secondes, et la mélodie elle-même trois minutes et 48 secondes… Alors soyez patient, continuez à écouter : dans les dernières secondes, une pirouette excentrique et poétique salue le Sar Péladan, Alfred Erik Leslie Satie.

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