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Lucia… sans Lucia !

Osons dire tout haut ce que chacun disait mezzo voce : quelle déception avec dans le rôle-titre, malgré son palmarès prestigieux et sa longue familiarité avec le rôle !

Un joli timbre, certes, dans les aigus tenus, bien qu'un peu nasal, mais beaucoup de difficultés dans les amplitudes, avec une voix qui hésitait entre la gorge dans les médiums et la poitrine dans les basses, flirtant parfois avec le miaulement, une voix qui n'était enfin ni dans le ton (acte I) ni dans le tempo (acte II). Heureusement la jeune Sicilienne, puisqu'il s'agit d'elle, s'est révélée excellente comédienne dans la scène de la folie, tantôt minaudant, tantôt hagarde, prostrée, hallucinée… Heureusement aussi, plusieurs spectateurs de la représentation précédente l'avaient trouvée en tous points excellente.

C'est le ténor (Edgardo) qui a raflé la mise et dominé incontestablement tout le casting. Beau gosse, avec une prestance de jeune premier romantique – a salué en lui le «nouveau Gérard Philipe de l'opéra» -, avec une voix puissante et impeccablement timbrée à faire se pâmer toutes les midinettes… il n'a pour autant écrasé aucun de ses partenaires : ni le ténor lyrique (Arturo), ni le baryton (Enrico), ni l'excellent (Raimondo, le chapelain), fort applaudi lui aussi.

Le décor, noir, plombé – mais quel affreux vitrail verdâtre de Christ en croix, à l'acte III ! -, fermait autour de Lucia un monde pesant, avec des choristes en rangs serrés, oppressants. Toutefois, nous aurions préféré des chœurs moins nombreux et moins présents, plus sobrement concentrés sur cette tragédie antique, «légendaire», terrible et inéluctable.

Alain Guingal a retrouvé, comme pour Rigoletto en 2008, la direction de l'Olrap dont il avait été chef permanent de 1975 à 1981, et chef invité plusieurs fois dans les dernières années. Mais en formation «mozartienne», privé de plusieurs de ses chefs de pupitre (violon, alto, violoncelle, cor) – sauf la flûtiste Odile Bruckert, légitimement ovationnée -, et malgré des supplémentaires, l'orchestre n'a pas toujours donné dans la nuance et la délicatesse, couvrant allègrement la voix des solistes au 1er acte.

Dans cette soirée avec quelques réserves, on a applaudi une partie du futur casting de la Traviata (Chorégies cuvée 2009) : (mise en scène), Jacques Gabel (décors), Franck Thévenon (lumières) ; et (baryton et ténor, Germont père et fils).

Si la soirée ne fut pas mémorable, restent le travail accompli et la musique de Donizetti…

Crédit photographique : (Lucia) & (Edgardo) © Cédric Delestrade, ACM-Studio

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