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Stephen Kovacevich, Klimt et Géricault

Pour ouvrir le concert, l' joue la Sérénade italienne de Wolf, plus connue dans sa version originale pour quatuor. Le début, avec sa mélodie pittoresque confiée à l'alto sur un accompagnement de pizzicatos, fait vraiment songer à la Sérénade d'un montagnard des Abruzzes, le troisième mouvement de Harold en Italie de Berlioz. Mais on retrouve vite le ton persifleur des miniatures de l'Italienisches Liederbuch. L'œuvre est trop laconique (sept minutes) pour qu'on puisse vraiment juger des qualités de l'Ensemble et du jeune chef. Dans le concerto L'Empereur, ils n'ont guère plus d'occasion d'attirer l'attention face à l'autorité de . On remarque tout de même que l'Adagio est élégamment exposé, et que la qualité d'ensemble est très louable.

Le pianiste doit une bonne part de sa célébrité à ses enregistrements des sonates et des concertos de Beethoven (dont le programme de l'Ensemble Orchestral indique d'ailleurs qu'il a vécu jusqu'en 1837 : on a hâte d'entendre ses symphonies n° 10 à 15… ). Sa virtuosité n'a quasiment rien perdu de sa fulgurance, au point de surprendre parfois l'orchestre par des foucades qui évoquent les chevaux de bataille peints par Géricault. Si la liberté du ton convient à un chef-d'œuvre aussi rebattu, elle ne tombe heureusement jamais ni dans l'excentricité, ni dans l'ostentation : la majesté du propos n'est jamais oubliée, le passage en octaves du premier mouvement n'est pas asséné, mais joué d'une seule coulée et en diminuant, et le jeu perlé donne des ailes au finale, après un Andante noblement sculpté. En bis, l'artiste offre une sarabande de Bach, dont la divine humilité rappelle qu'il fut, il y a cinquante ans, élève de la grande Myra Hess.

En seconde partie, la Symphonie de chambre de est malheureusement donnée dans une version orchestrale, et non dans sa configuration initiale pour 23 instruments (dont un harmonium, un piano et un célesta). Même si cet arrangement est sans doute de l'auteur (aucune précision dans le programme à ce sujet), l'œuvre y perd en transparence sans y gagner en couleur. Au contraire, l'habileté de l'instrumentation originale est telle que Schreker donne l'impression de condenser à la fois la démesure de l'orchestre de Richard Strauss, la ferveur de la musique de chambre de Brahms et la séduction de Ravel. Néanmoins, grâce à la conviction de l'Ensemble Orchestral, au jeu précis et sensible, et à la direction soignée de Juraj Valcuha, un peu timide malgré tout, on se délecte de cette mosaïque scintillante et vénéneuse, qui ressemble bien plus aux tableaux chatoyants de Klimt que les œuvres de Mahler auxquelles on associe généralement le peintre.

Crédit photographique : © Tomokai Hikawa

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