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Bartók et Gergiev, l’artisanat furieux

Avant de faire entre le CD dans le lecteur, on sait maintenant à quoi s'attendre avec un enregistrement de dans les œuvres du XXe siècle : de l'explosif, de l'intense, du furieux et un orchestre chauffé à blanc à la limite du criard. Rebelote avec ce Château de Barbe-Bleue de , pris dans une fusion orchestrale.

Comme toujours, Gergiev fait du Gergiev. Pas de lecture hédoniste à la Doráti (Mercury, 1962), Kerstész (Decca, 1966) ou Solti (Decca, 1979), trois version faites avec le LSO. Pas non plus de lecture analytique et de mise en avant de chaque détail de la partition, comme l'ont fait Boulez (DG, 1998) ou Eötvös (Hanssler, 2001) ni de de luxuriance orchestrale – Sawallisch (DG, 1979), Haitink (EMI, 1996) et Fischer (Philips, 2001). C'est que les versions de références se bousculent pour ce chef d'œuvre du XXe siècle. réussit le tour de force de s'imposer dans une discographie bien encombrée (ne serait-ce que huit versions enregistrées depuis 2001), aidé par un couple Judith / Barbe-Bleue idéal.

Point de soprano dramatique wagnérienne, mais une jeune mezzo russe, plus habituée à chanter Mozart, Strauss ou Tchaïkovski. possède des moyens immenses, à la mesure du rôle, tout en possédant la juvénilité nécessaire. Le vibrato est maîtrisé, les aigus triomphants, bref, une Judith idéale. A ses cotés, Sir est un habitué du rôle, dont il est, à l'heure actuelle, un des principaux défenseurs. Pour les accompagner, ne cherche pas à déployer son orchestre : l'atmosphère doit être oppressante, l'orchestre, omniprésent, maintient une pression à la limite du supportable. Dans les moments paroxystiques (ouverture de la cinquième porte, le Royaume de Barbe-Bleue) les cuivres se font volontairement durs, les bois volontairement aigres. Rien ne doit être optimiste dans ce huis clos.

La prise de son, excellente, dans les conditions du concert, ajoute à l'urgence de cette interprétation, à placer aux coté de celles sus-nommées. Petit plus non négligeable, la lecture du prologue (en anglais) qui s'enchaîne directement avec les quelques mesures du prélude. Une version de référence, une de plus.

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