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 J’ai tant rêvé de toi

Festival Musique et Nature

Si une chose est commune à tous les hommes, c'est probablement la quête d'un amour idéal qui s'assouvirait de toute peur, un amour éternel. Mais cette quête s'est, tout au long de l'histoire humaine, trop souvent révélée n'être qu'un long chemin de désillusions.

, et Andrew Lawrence-King ont proposé au public du Festival Musique et Nature autour des airs de romances séfarades, des chants de la nuit et de la danse, de remonter aux racines de ces songes qui nous unissent pour le meilleur et pour le pire. Ils ont recréé par leur interprétation l'instant du rêve où entre théâtre et réalité, la peur disparaît laissant le champ des possibles ouvert sur l'inconnu. Et l'écrin préservé de la vallée des Bauges a participé à l'illusion. Cette musique et cette poésie peuvent avoir une apparence simple voir naïve. Et pourtant elles ont su traverser les siècles.

Chant de l'ailleurs et de l'exil, les chants séfarades ouvraient ce concert. Entre l'innocence du rêve de la jeune fille dans El rey de Francia, ou l'égoïsme de ces hommes en quête d'héroïsme avec Por qué llorax blanca niña, Montserrat Figueiras sait trouver les couleurs et l'expressivité théâtrale qui fait ressentir le bonheur ou le malheur d'aimer.

Son chant éloquent et expressif, passe de la plainte murmurée à l'incantation envoûtante. Elle rend magique l'innocence du rêve et bouleversante l'amertume de ces femmes désabusées. Voix venue de mondes inconnues, maîtrisant les différentes langues de ce parcours de l'émotion, par son phrasé elle donne aux mots une authenticité poignante qui nous atteint au cœur. Ainsi l'insatisfaction permanente de l'être humain dans sa quête n'en est que plus dramatique.

à la viole et Andrew Lawrence-King à la harpe triple ou médiévale accompagnent avec sensibilité et rivalisent de virtuosité dans les folias ou les fantaisies. La viole respire, semble vibrer de la souffrance d'aimer ou peut être de ne pas aimer. La harpe céleste devient dans la danse un tambourin et les fantaisies permettent à l'interprète de nous faire entendre la palette de cet instrument souvent réduit aux sphères immatérielles des anges, alors que dans la Jácara No hay que decirle el primor elle révèle un feu diabolique et séduisant.

Dans les deux bis les trois musiciens en une ultime pirouette passent de la tragédie du Testament de la Reine Amelia à une joyeuse canzonetta. L'amour insaisissable se joue de celui qui ne se méfie pas des ombres du sommeil. , et Andrew Lawrence-King ont enchanté par leur virtuosité ces musiques si modestes, si humbles et pourtant si riches . Des airs si bouleversants qu'à la fin du premier bis un long, très long silence a précédé des applaudissements enthousiastes, montrant que même si la langue nous était étrangère, l'expressivité des interprètes pouvait nous faire entendre le sens des mots. Après des siècles de quête, les paroles du poète ne diffèrent pas: «J'ai tant rêvé de toi…»…

Crédit photographique : © Monique Parmentier

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