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Pour l’étonnant Tamerlano de Bejun Mehta

Affubler sept ou huit gardes-chiourmes d'uniformes pseudo-nazi afin de limiter ou d'élucider l'espace concentrationnaire du lieu, revêtir Bazajet des habits impériaux d'un Ottoman déchu alors qu'Andronico et Tamerlan portent costume-cravate, ajouter lors de quelque explication dans le programme de salle un certain signifiant pseudo-pédagogique à ces variations vestimentaires, voilà qui relève d'une franche escroquerie… pour ne pas écrire d'un franc délire !

Et disons-le tout net et simplement, n'ajoute rien à cette approche légèrement problématique de cet excellent Tamerlano de dont les quelques rares éléments de décor (une chaise, une table, deux trônes) permettent alors d'appréhender à plein les ressentiments, angoisses et autres bonheurs existentiels de nos protagonistes.

Saluons dès l'abord l'étonnant , dont le Tamerlano, violemment impliqué (puisque vainqueur, amoureux et sadique à souhait) alimente à lui seul la conflictualité permanente de l'œuvre. Son contre-ténor, agile, solidement contrôlé, virtuose, sonne franc, juste et conquérant (mais aussi rude, âpre et soupçonneux), se teinte ici ou là de couleurs inattendues et bienvenues. L'Andronico de , en débuts locaux, suffisamment présent, aux aigus tendres et délicats, conclut un premier acte sur un glorieux «Benche mi sprezzi» et sait atteindre aux actes 2 et 3 à l'émotion vraie. , précise et virtuose, négocie ses interventions avec intelligence, avec idiomatisme également… Jennifer Holloway, elle aussi en débuts locaux, démultiplie, elle, les excellents moments. «L'Amor dà guerra e pace» de Ryan McKinny valorise soudainement Leone. Reste , qu'il faut ici féliciter de nous avoir ainsi offert, en tant que Directeur Général du Los Angeles Opera un Tamerlano si peu fréquenté et d'avoir ainsi ajouté un 130ème rôle à son tableau de chasse… mais seul son «Figlia mia» final mérite étoile. , qui fait montre d'une extrême considération, d'une extrême sollicitude vis à vis de ses trente-cinq instrumentistes à l'orchestre, dirige avec conviction.

Crédit photographique : (Tamerlano) ; (Bajazet), (Tamerlano), (Asteria) © Robert Millard

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