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Orphée et Eurydice dans la version de 1774 avec Juan Diego Flórez

Effectué sur le vif au printemps 2008, cet enregistrement d'Orphée et Eurydice est un nouveau reflet de la version parisienne de 1774, celle remaniée par Gluck à l'intention du haute-contre Joseph Legros, créateur également des rôles d'Achille dans Iphigénie en Aulide, de Renaud dans Armide ainsi que d'Admète dans la version révisée d'Alceste.

En raison de la tessiture extrêmement tendue du rôle-titre, phénomène encore accentué par la montée progressive, depuis deux siècles, du diapason, les ténors modernes sont peu nombreux à avoir osé se risquer à la partie d'Orphée, et il faut remonter à Léopold Simoneau et à Nicolaï Gedda pour se faire une idée de la façon dont doit réellement «sonner» la version parisienne. Plus récemment, l'Américain , avec des moyens vocaux plus modestes mais un «coaching» musical plus adapté, a lui aussi, sous l'égide de Marc Minkowski, pris le parti de se mesurer à la redoutable partie d'Orphée. On retrouvera également Roberto Alagna dans un tout récent DVD réalisé à Florence, quelque peu gâché hélas par le charcutage difficilement justifiable de la partition.

Ici, c'est le Péruvien , habitué du répertoire bel cantiste et rossinien tout particulièrement, qui prête sa voix richement timbrée aux dignes accents du personnage de Gluck. La performance vocale, il faut le reconnaître, est tout à fait exceptionnelle. Flórez se rie des difficultés techniques de la partition, et n'a aucun mal ni à tenir la ligne des passages les plus tendus, ni à satisfaire aux vocalises du redouble «L'espoir renaît en mon âme» de la fin du I, cet air si souvent coupé par les ténors… Qui plus est, il fait montre de belles qualités expressives, jouant subtilement des belles vibrations du timbre cuivré de sa voix. Son français en outre paraît en net progrès par rapport à de précédentes prestations…

L'entourage est d'un niveau moyen mais acceptable, avec l'Eurydice quelque peu trémulante d', et l'Amour assez terne d'. Mais qui écoute Orphée pour les rôles féminins ? L'orchestre et les chœurs du Teatro Real de Madrid sont d'assez bonne tenue, sans parvenir toutefois à égaler la lecture récente de Minkowski à la tête de ses musiciens du Louvre. On leur saura gré néanmoins, sous la baguette aérée de Jesús López-Cobos, d'éviter l'impression de lourdeur souvent laissée, dans les opéras de Gluck, par les formations traditionnelles non spécifiquement spécialisées dans le répertoire baroque.

Une assez belle réalisation, qu'on retiendra essentiellement pour l'interprétation de Flórez…

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