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Carmen Side Story à Bordeaux

La saison bordelaise s'ouvre sur un véritable four : distribution inégale, orchestre brouillon, chœur braillard, mise en scène chahutée… Chronique d'une production gâchée.

Gâchée, car a tout d'une grande Carmen. Le physique bien sûr, à faire pâlir plus d'une consœur. Le timbre de la voix est sombre et généreux, l'ambitus large de sa tessiture lui assure de chanter toutes les notes, la prononciation, si elle peut encore progresser, est soignée. Enfin la chanteuse est aussi une excellente actrice. L'ensemble des seconds rôles est très bien tenu, notons les prestations de , Eric-Martin-Bonnet et du tout jeune , qui aurait pu largement remplacer l'Escamillo de ce soir.

Car là réside une des grandes faiblesses de la production, les trois autres premiers rôles, ce qui n'est pas rien. , malgré un professionnalisme indéniable, n'a pas les épaules pour le rôle de Don José et est vite dépassé par le rôle, visiblement trop lourd pour lui. ne manque pas de décibels, emporte l'adhésion lors de son air «Je dis que rien ne m'épouvante» mais sa prononciation catastrophique du français gâche tout. Enfin Michael Chioldi est LA grande erreur de distribution : voix engorgée, français incompréhensible, aigus poussifs, graves inaudibles, jeu scénique maladroit… Les Escamillo de qualité ne manquent pas pourtant.

L'autre grande faiblesse de taille est le chœur et l'orchestre. Sous la direction poussive et balourde de , l'ONBA sonne comme un gros orphéon : les cuivres sont braillards, les cordes hétérogènes, les bois aigres, aucun solo n'est réussi… Quant au chœur ce n'est pas mieux, aucune homogénéité, aigus serrés, … Seul le chœur d'enfants tire son épingle du jeu.

Reste la mise en scène, fraiche et inventive, malgré les huées du public. C'est qu'il faut pouvoir se mesurer à Carmen. Laurent Laffargue situe l'action dans une période contemporaine, au Mexique, la contrebande étant aussi le passage vers les Etats-Unis. L'abondance de couleurs, la présence de nombreux figurants et les quelques pas de danse lors des ensembles approchent cette Carmen de la comédie musicale. Ce qui n'empêche pas une caractérisation précise des personnages. Ainsi Don José dès l'acte II se révèle jaloux et violent, on comprend bien qu'Escamillo ne veut Carmen que pour se divertir au lit, Zuniga est un policier corrompu, … En passant le sur fait que Lilas Pastia ait changé de sexe entre le livret original et la version scénique présente.

Une mise en scène réussie, mais une réalisation musicale bâclée.

Crédit photographique : (Zuniga), (Carmen) ; (Le Dancaïre), (Don José), (Le Remendado) (Carmen) © Guillaume Bonnaud

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