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Mozart, Molière et Rimbaud

Le concert débute par une œuvre secondaire, mais néanmoins fort belle, de  : composée à dix-huit ans, la Sérénade ignore superbement le modèle de Siegfried Idyll pour tendre la main à la Gran partita. Le plus étonnant est que le jeune homme ne manque pas de très loin le secret de la grâce mozartienne, tout en créant déjà les voluptueuses effusions qui seront sa marque. La direction impétueuse de ne néglige pas l'expressivité, même si la beauté sonore n'égale pas celle des formations spécialisées.

Avec Les illuminations de Britten, c'est au tour des cordes de s'illustrer, en compagnie de . La tessiture ne pose pas de problème à une artiste dont on connaît la précision vocale, le son est bien projeté, et pourtant, malgré les efforts évidents de diction, elle reste peu compréhensible. Il est vrai que ni la poésie hermétique, ni l'écriture de Britten ne favorisent une clarté déjà problématique pour la voix de soprano, comme la chanteuse elle-même le remarquait dans une interview pour Resmusica. Du moins se fait-elle l'instrument lumineux des visions qu'elle décrit sans céder à la narration, ni à la sentimentalité. La froideur tient lieu d'ironie ou d'émotion, ce qu'on peut regretter. On pourra plus sûrement lui reprocher un manque de détails, de sous-entendus, d'autant plus qu'elle offre quelques superbes gros plans («Tes crocs luisent» dans Antique). ne lui laisse guère le temps de s'appesantir, comme s'il cherchait à prévenir une perte d'acuité chez les instrumentistes. On lui doit la vigueur de Royauté, l'accablement de l'Interlude et la mobilité de Parade. En somme, de belles Illuminations, sans mystère, mais limpides et distanciées. Dans le délectable Bourgeois gentilhomme, on retrouve en réduction tout l'orchestre de Strauss. Les musiciens de l' y trouvent mainte occasion de démontrer leurs qualités individuelles et leur bonne entente avec leur directeur musical honoraire. Le ton oscille justement entre pastiche à la Pulcinella et profusion «nouveau riche», et la clarté et la cohésion pallient le manque de raffinement des timbres. Si le violon de manque de piquant pour camper le Maître d'armes, le violoncelle de Guillaume Paoletti a beaucoup de présence.

Cet appréciable concert était malheureusement assombri par la disparition récente de Pierre Theurier, régisseur de production de l'Ensemble. Le concert lui était dédié et le Larghetto de la première Symphonie de Schumann a été donné en sa mémoire.

Crédit photographique : © David Zaugh

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