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Fricsay dirige Bartók, un monument d’Histoire

L'excellent label berlinois  Audite réputé pour le grand soin apporté à ses publications à la bonne idée de réunir en coffret des interprétations légendaires du grand chef hongrois dans des partitions de son compatriote .

Le digipack reprend l'intégralité des enregistrements studios du chef pour la radio RIAS (désormais Deutschland Radio Berlin). Ils sont donc des compléments aux enregistrements que le musicien a réalisés pour la Deutsche Grammophon. D'ailleurs, une partie de ces témoignages avaient été éditée chez DGG (Deux portraits, Cantata profana, Musiques pour cordes percussions et célesta et Suite de danses). Le reste  est intégralement inédit !

Pour faire simple, le Bartók de Fricsay allie une force tellurique à une profonde humanité. Sa lecture de la Suite de danses est véritablement tétanisante et explose dans un cataclysme sonore en technicolor avec une virtuosité rythmique de tous les instants. Quant à la Musique pour cordes, percussions et célesta, elle sidère par sa puissance dramatique et ses hurlements orchestraux aux climax rageurs. Personne n'est allé, humainement et dramatiquement, aussi loin, dans la synthèse des danses que dans l'exploration des souffrances et des braises de la Musique pour cordes, percussions et célesta. Sévèrement burinée par une langue allemande, qui lui donne des aspects presque constructivistes et motoriques, la Cantata profana est un autre diamant de la discographie ciselé par les interventions du ténor et du légendaire .

Du côté des solistes, si le tandem Fricsay-Anda a toujours fait des étincelles, les alliages avec et étonnent par le sens des couleurs du premier et par la poésie moderniste du second. Mais c'est le Concerto pour violon n°2 qui casse la baraque ! Certes, n'a jamais été le plus précis des violonistes, portant il est emporté dans un véritable maelstrom orchestral incandescent avec un mouvement final qui arrache tout sur son passage. Certes, c'est parfois imparfait sous les doigts du soliste en matière de fini instrumental, mais la force de cette lecture et ses prises de risque sont sans égal dans la discographie.

On tient donc un monument de l'histoire de l'interprétation et un hommage à un chef, trop tôt disparu, qui est l'équivalent des Toscanini et Furtwängler. Au niveau des interprétations de Bartók, c'est également des témoignages indispensables car ils proposent un Bartók humain, assez proches de ceux d'un Karel Ancerl, mais bien plus humain que les démonstratifs Georg Solti (lire notre portrait) (Decca) ou Pierre Boulez (DGG).

Le fini éditorial du produit et surtout la qualité des reports sont d'autres arguments pour faire de ce  coffret une pierre angulaire de la discographie.

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