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Noël avec Ton Koopman

Tout bien pensé, il est rare que l'on ait envie de parler de l'atmosphère d'un concert. On peut trouver les interprétations plus ou moins réussies, les artistes plus ou moins sympathiques, tantôt froidement professionnels, tantôt gentiment émus. Mais d'ordinaire, le spectateur sur son siège, qui vient savourer quelques instants musicaux, reste retranché dans sa tour d'observation ; quand le concert est réussi, il recueille quelques émotions, dont il jouit personnellement, et rentre chez lui satisfait. Bien habile le musicien qui, au prix d'une implication totale, parvient à envoûter ce consommateur désengagé et à le persuader d'abaisser ses murailles individuelles, à le convaincre d'entrer pleinement dans le mouvement de la musique. Et c'est une telle prouesse qu'a accomplie  : à l'écoute des quatre cantates qu'il avait choisies (sur les six composant l'Oratorio de Noël de Bach), impossible de ne pas ressentir quelque chose de la joie de la Nativité. L'allégresse constante qu'irradiait ce chef d'orchestre, qu'il savait transmettre à ses musiciens par ses mouvements amples et généreux, à la limite parfois même de l'outrance, envahissait immédiatement le public ; si bien qu'en ressortant de ce concert, on retenait cette atmosphère « bon enfant », cet enjouement candide, cette gaîté même, présente déjà dans l'œuvre de Bach (qui n'économise aucune ingéniosité harmonique, aucune facétie expressive), que les artistes nous avaient communiquée de si bonne grâce.

C'est volontiers qu'on oubliait alors les quelques imperfections du concert, dont il faut bien pourtant dire un mot. Il est vrai que la présence de la soprano solo, la suédoise Lisa Larsson, semblait un peu fortuite ou incongrue, comme si celle-ci n'avait pas pris la peine de s'informer de l'œuvre et des musiciens qui se produisaient avec elle. Sa diction approximative, sa voix grêle, presque métallique et souvent faible, ont impitoyablement révélé ce décalage, dont le symptôme le plus voyant était certainement l'accoutrement fantaisiste pour lequel elle avait seule opté. Déplorons aussi une certaine mollesse du pupitre des cordes, qui peinaient et solfiaient dans les passages les plus dansants, malgré l'énergie déployée par pour les faire avancer, ainsi qu'un lamentable solo du premier violon, semblant déchiffrer sa partition tant les fausses notes se bousculaient ; peut-être l' a-t-il peu l'habitude de ce répertoire ?

Mais venons-en aux prestations éblouissantes des trois autres solistes. , que le public lyonnais a la chance de voir régulièrement, s'acquittait de sa partie de basse avec un plaisir d'autant plus évident qu'il ne semblait pas lui coûter le moindre effort. Remarquable également était la mezzo-soprano , qui, avec une voix pure de tout afféterie, donnait au texte et à la musique une dimension plus introspective, particulièrement heureuse. Enfin, le ténor, , ne s'est pas laissé submerger par la difficulté et la longueur de sa partie d'évangéliste, et ses soli ont toujours été très convaincants, grâce à son superbe timbre de voix. Quant au Chœur baroque d'Amsterdam, il s'en tirait avec honneur ; sa maîtrise de ce répertoire était visible, malgré une diction peut-être un peu imprécise.

 

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