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Orlando ouvre les festivités à Versailles

Après le succès de « Venise Vivaldi Versailles » en 2011, le Château de Versailles propose un passionnant festival intitulé « Le Triomphe de Haendel », regroupant les œuvres majeures du compositeur: les opéras Giulio Cesare, Serxes ou Alcina, mais aussi les oratorios Messiah, Solomon, Saul ou Israel in Egypt, œuvres entremêlées de prestigieux récitals où les contre-ténors sont à l'honneur ainsi que l'incontournable Cecilia Bartoli.

C'est avec son chef d'œuvre Orlando que débute le festival. En effet, Orlando bouscule les conventions de l'écriture baroque, et sa « scène de la folie » est un moment très attendu. En effet, le personnage sombre dans la démence lorsqu'il comprend qu'Angelica ne partage pas son amour et qu'elle est de plus fiancée à Medoro.         Ce sont désormais les bien connus et spécialistes de la musique du caro sassone : , qui ont eu l'honneur d'ouvrir le festival et de faire vivre le drame d'Orlando. Après un départ inquiétant (un orchestre manquant de chair et de tension dramatique), les choses se sont quelque peu améliorées, avec quelques heureuses idées musicales de la part du chef (les sonorités rustiques et bucoliques de l'entrée en matière au second acte « Quando spieghi », ou les tempi vivifiants des airs de basse).

Dans le rôle titre, fait valoir la clarté de sa voix ronde et chaleureuse (avec un timbre légèrement nasillard toutefois) et prête à son personnage une noblesse et une grandeur (so British) là où un Bejun Mehta (récemment à Bruxelles) était de sang et de feu. Ainsi, même si sa scène de la folie accuse une certaine retenue, tous ses airs passionnent. La douceur de son timbrebfait merveille dans des pages comme l'air du sommeil délicatement accompagné à la viole d'amour. Angelica, responsable de tous ses tourments, est magistralement interprété par une , tout en mezza voce, culminant dans un « Cosi giusta e questa speme » aux vocalises suaves et un chant tout en demi-teintes. Elle contribue aussi à un autre highlight de la soirée : le trio « Consolati, oh bella ».

Même si le rôle n'est pas très intéressant, Christina Hammarström prête idéalement sa voix chaude à un Medoro d'une touchante et élégante tenue. Mais c'estla bergère Dorindaqui a finalement suscité le plus d'intérêt. Sa voix légère, ronde et souple a fait mouche par sa simplicité en relevant le caractère innocent et mélancolique du personnage ; Emoke Barath parachevant sa prestation par un admirable « Amor e qual vento » se jouant avec aplomb de l'alternance des notes graves et aiguës. Un véritable tour de force ! Enfin Le baryton-basse complète brillamment la distribution, avec notamment un virtuosissime « Sorge in fausta la procella ».

Au final, une soirée fort réussie portée par une distribution de haut vol mais un chef inégalement inspiré encore. On déplore aussi quelques coupures : quelques da capo et les airs d'Angelica « Verdi piante » et celui de Zoroastro « Tra caligini profondi » au second acte ; mais l'auditeur repart avec le sentiment d'avoir assisté à un concert unique dont la pertinente distribution a confirmé le titre du festival ainsi que ses triomphes à venir.

Crédit photographique : © Kohei Take

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