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Metz, création lyrique de Caroline Glory et PPDA

Un plateau vocal de qualité pour un ouvrage, Un Amour en guerre de , qui devra faire ses preuves.

Saluons pour commencer l'originalité et la pertinence du projet, destiné à commémorer le centenaire du début de la Première Guerre Mondiale. Quel lieu plus approprié que l'Opéra-Théâtre de Metz Métropole pour donner sa première chance à cette nouvelle création lyrique, conçue comme un hommage aux soldats disparus ! Inspiré de correspondances entre poilus et leurs familles, l'ouvrage met en parallèle l'insupportable vie dans les tranchées et sur le champ de bataille et celle, à peine moins dure, des familles éplorées laissées à la maison. L'intrigue se focalise ici sur Jacques, soldat porté disparu, et sa fiancée Madeleine, victime des assiduités de son voisin reformé Antoine, profiteur de guerre à sa manière. Le retour inopiné de Jacques dans la mansarde parisienne, à la fin de l'ouvrage, permet de donner une issue heureuse à ce qui aurait pu se terminer comme un sombre mélodrame.

Le livret aurait pu être un collage d'extraits de lettres et de correspondances, ce qui aurait donné davantage d'authenticité au texte chanté, irrémédiablement gâché par des alexandrins de potache : « C'est la grippe espagnole, qui décime l'arrière / Bientôt sa course folle fera machine arrière ». Difficile à supporter sur une durée d'une heure trente ! La musique est à l'avenant, même si à aucun moment elle ne dérange l'oreille. Parfaitement tonale de la première note à la dernière, composée d'une succession de mélodies faciles et sans prétention, elle s'apparenterait plutôt à de la comédie musicale ou de la musique de film. On pense à un impossible hybride entre Les parapluies de Cherbourg, L'opéra d'Aran de Gilbert Bécaud et un ouvrage belcantiste de la première moitié de l'ottocento.

Le plateau réuni pour l'occasion est de la plus grande qualité, le seuil maillon faible étant le ténor Antoine Chenuet, souvent fâché avec la justesse et visiblement dépassé par la difficulté vocale de sa partition. Belles prestations en revanche de la soprano et du baryton , tous deux convaincants dans les rôles, à la limite du vaudevillesque, du voisin Antoine et de l'amie de Madeleine, la bien-nommée France. , émouvante Madeleine au soprano franc et clair, est investie corps et âme dans son rôle. Malheureusement son vibrato devient envahissant au point de compromettre une diction autrefois en tout point exemplaire. , enfin, domine parfaitement la tessiture incroyablement tendue du rôle de Jacques dont il propose un portrait tout à fait attachant. Les chœurs s'hommes des Opéras de Metz et de Nancy sont vocalement à la hauteur de la situation, même si la mise en scène les laisse quelque peu à l'abandon en leur conférant dans de nombreuses scènes des postures par trop statiques.

C'est en effet aux scènes de la mansarde parisienne que les deux metteurs en scène, et Patrick Poivre d'Arvor, semblent avoir consacré toute leur attention, donnant lieu à une direction d'acteurs juste et convaincante, encadrée par un décor unique sobre, efficace et habilement conçu. Permettant à tout moment de de faire le lien entre l'action sur le front et celle de la mansarde, il donne au spectacle l'unité et la cohérence qui font tant défaut au texte.

En somme, un spectacle qui n'est pas sans qualités. L'ouvrage est-il promis à une grande carrière sur la scène lyrique ? Vu la naïveté du livret, la maigreur de l'intrigue et la simplicité de la musique, on peut en douter. Recyclé en comédie musicale, voire en spectacle pour enfants, il pourrait en revanche avoir quelque avenir pour les quatre années de commémoration à venir.

Crédit photographique : et (photo 1) ; Chœurs d'Hommes de l'Opéra National de Lorraine et de l'Opéra-Théâtre de Metz Métropole (photo 2) © – Metz Métropole

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