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Semiramide au TCE : semi-aride

Véritable testament de la période napolitaine où Rossini écrivit la majorité de ses opere serie, Semiramide, donnée en version de concert au Théâtre des Champs-Elysées tend à être une oeuvre qui démontre la difficulté actuelle que connaît ce répertoire pour trouver ses interprètes.

En effet, après les monstres sacrés féminins d'abord, puis masculins ensuite dans la seconde partie du XXème siècle, et maintenant que pratiquement toutes les œuvres du compositeur de Pesaro ont été exhumées, que reste-t-il pour favoriser la pérennité de la Rossini Renaissance? Certainement des chanteurs à la hauteur de ce qu'exige le bel canto romantique, non pas tant en termes de technique que de style.

Dans la lignée de ce que les chanteurs de l'Est peuvent symboliser,  est une chanteuse délicieuse qui brille facilement dans les œuvres où sa voix légère (mais non nécessairement colorature) excelle. Le rôle de Semiramide exige une certaine étoffe et bien que la voix se soit épaissie par rapport à ce que l'on pouvait entendre il y a quinze ans (notamment, le grave qui était inexistant trouve actuellement une certaine assise), les vocalises sont parfois esquissées, plutôt bien dessinées, mais confinant jusqu'à l'inaudible souvent. On entend néanmoins le métier, la sûreté du placement de la voix, la plénitude du timbre comme, toutes proportions gardées, une Edita Gruberova. Le cas de est différent: la voix est très en arrière, flottante, voire pas très juste dans le haut médium est l'aigu, avec des respirations mal placées (on aura entendu beaucoup de phrases entrecoupées, là où justement le bel canto doit laisser l'illusion du souffle qui n'en finit plus); l'étendue vocale est là, avec un grave sonore, mais à l'ensemble un peu brouillon, qui s'échauffe toutefois au cours de la soirée pour devenir plus confortable dans le second acte. Face à ce redoutable héros, le rôle d'Assur, incarné par le superbe , dont il s'agit là d'un des chevaux de bataille. On y retrouve son autorité naturelle, sa superbe dans l'intonation, et la puissance vocale sans difficultés; on assume aussi la perte, avec les années, du brillant et du mordant dans les vocalises qui deviennent plus cotonneuses qu'auparavant, ce qui semble être aussi l'évolution naturelle de la voix.

Le réel triomphateur de cette versions de concert, malheureusement trop court eu égard temps qui lui est échu , est , qui est un Idreno amputé de son premier air (que ne le regrette-t-on ici, quand dans d'autres soirées, on supplierait pour achever le supplice), mais qui emporte le morceau rien que dans le deuxième acte: quelle projection, quelle insolence dans cette voix vigoureuse, à l'aigu sans failles et à la belle ductilité dans les vocalises!

Enfin, , moins trublion qu'à son habitude, qui accompagne parfois de façon trop couvrante ses solistes, mais sait souvent obtenir un tissu dense, enveloppant, confortable de l'Orchestre de l'Opéra de Lyon.

Soirée plutôt agréable, parce que l'oeuvre est géniale et rarement donnée, avec la difficulté de se départir du souvenir d'autres voix, perdues dans les mémoires des microsillons.

Crédit photographique : © Greg Figge

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