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Richard Strauss réussit de nouveau au National

Bis repetita serait-on tenté de dire après ce nouveau concert de l'Orchestre National, qui, non content d'offrir un programme à la structure fort similaire à son premier concert complet en ces lieux, nous laisse sur une sensation tout aussi identique avec une première partie ronronnant sagement précédant un grand poème symphonique de Strauss nettement plus captivant.

Débutant la soirée sur les Variations sur un thème de Haydn de Brahms le chef allemand nous a semblé tout au long de ces quelques vingt minutes de musique comme avoir peur de mordre à pleines dents dans cette partition, ne jouant pas avec ces variations autant qu'il aurait pu, ne donnant pas à chacune d'elle un caractère bien affirmé. Ainsi sonnèrent-elles trop lisses, toute en politesse, et jamais nous ne sentîmes une réelle progression entre elles, le final arrivant ainsi presque par hasard. Certes il n'y avait rien de déshonorant dans cette exécution, mais rien de palpitant non plus.

Après un Brahms pris presque « à reculons » enchaînait un concerto de Beethoven un poil plus décidé. Si ouvrit le concerto de façon très sobre, ce qui est parfait, on sentit une légère sècheresse de touché et de phrasé qui allait se confirmer par la suite, ce qui retira à cette œuvre une partie de sa poésie, et donc de l'émotion simple et directe qu'on devrait ressentir. L'orchestre répondit à cette introduction du piano par un superbe pianissimo des cordes, mais un soupçon d'affectation dans le legato qui gâcha un peu cette belle entrée des cordes. La suite de cet Allegro moderato nous donna le sentiment que le chef et le pianiste, et accessoirement l'orchestre, n'avaient pas atteint l'accord parfait qui les aurait fait jouer avec plus de liberté et d'intensité, et qu'il leur manquait pour cela quelques heures de travail en commun supplémentaires. Cela se sentit avec plus d'évidence encore dans le deuxième mouvement avec l'alternance de l'énergique sempre staccato à l'orchestre et du si émouvant molto cantabile du piano, ce soir pas assez intégré à nos oreilles, et plus émouvant du tout.

Avec Ainsi parlait Zarathoustra comme avec Une vie de héros deux semaines avant, l'intérêt grimpa nettement. On y sentit le chef bien plus à l'aise, osant plus de tout et le réussissant, et un orchestre le suivant plus franchement. Cette fois-ci plus de sensation d'avancer à reculons, et c'est avec plaisir que nous nous sommes laissés emporter dans les différents épisodes de ce poème symphonique dont la grande dynamique n'eut aucun mal à s'exprimer dans cette acoustique proche et boisée. Tout au plus nous sommes nous parfois dit qu'un orchestre sonnant comme un seul homme, ce que ne réussit pas tout à fait le National dont les pupitres gardent leur indépendance, aurait eu encore plus d'impact et de force de conviction dans les moments paroxystiques comme dans le chemin qui y mène, mais ce n'est pas forcément la tradition des musiciens français. Un beau Strauss quand même.

Crédit photographique : Marco Borggreve

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