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Le saxophoniste espagnol Ricard Capellino en solo

Consacré au saxophone, celui de Ricard Capellino qui compte aujourd'hui parmi les plus grands ambassadeurs de l'instrument en Espagne, cet album fait la part belle à la création ibérique et offre un panel d'œuvres, avec ou sans électronique, qui attestent de la richesse et de la ductilité d'un instrument se révélant ici dans son identité plurielle.

Quatre saxophones sont en effet convoqués, du soprano à la basse, dans les cinq pièces enregistrées. Fulgida niebla de sol blanquecino (2010) du compositeur espagnol , qui ouvre l'album, est une exploration aussi subtile que radicale des sonorités profondes du saxophone basse dont l'électronique creuse et amplifie les spécificités du matériau, générant des nappes de sons impressionnantes. La pièce endurante – on pense à – sollicite le souffle continu et une tension permanente, vaillamment assumée par Ricard Capellino. Le saxophone est un instrument qui compte dans le catalogue d' dont l'interprète joue une seconde pièce, Anábasis pour saxophone ténor : autre voyage introspectif et tout aussi virtuose au sein de la matière, progressant lentement vers le registre clair de l'instrument. Chymisch pour saxophone baryton et électronique du catalan Hector Parra est une pièce extrêmement concentrée, alliant fulgurance du geste et kaléidoscope de couleurs démultipliées par la magie de l'électronique. La pièce réclame agilité vertigineuse et précision des attaques, des qualités déployées par l'interprète mis ici au défi. Plus reposante mais non moins intrigante, iv12 pour saxophone soprano de Mark André expose une matière fragile, à la marge du souffle et du silence que l'interprète colore de diverses manières. A l'instar d'un Lachenmann, André s'intéresse ici davantage à la production du son qu'à son épanouissement : à cette musique minimale et fantomatique, Capellino confère mystère et sensualité. C'est l'interprète lui-même qui réalise l'adaptation pour saxophone basse de Décombres de . La pièce originellement écrite pour tubax et électronique referme cet album dans le contexte sonore saturé que le compositeur appelle de ses vœux. L'électronique fusionne ici avec une matière instrumentale chauffée à blanc à laquelle se mêlent la voix et le cri du saxophoniste. Si l'excès du geste et la manière sauvage saisissent, des instants d'« infra-saturation » que ménage l'interprétation nuancée de Capellino, suscitent d'autres situations d'écoute, permettant, selon les termes du compositeur, « d'entendre l'énergie à sa source ».

 

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