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Symphonies de Tchaïkovski : suite et fin de l’intégrale à Lyon

Intelligemment appariées et interprétées, les symphonies de Tchaïkovski sont encore et toujours un triomphe.

C'est le volet central du Festival Russe que propose, à l'orée de l'hiver, l' : sous la baguette de , son directeur musical, une relecture complète des symphonies de Tchaïkovski. Après le début prometteur consacré aux symphonies n° 1 et 4, la série se conclut avec la Troisième et la Sixième. Le public, fidèle comme toujours, semble conquis comme jamais : l'immense salle de l'Auditorium, qu'elle bruisse de chuchotements émerveillés ou éclate en applaudissements, devient la caisse de résonance des sentiments que les musiciens convoquent et transmettent. Des instrumentistes jusqu'au chef, tous font preuve, dans une musique où seule une réalisation parfaite séduit vraiment, d'une réjouissante maturité.

Il y a certes quelques progrès à venir : on rêverait que les pupitres de cuivres, en plus de jouer les thèmes qui leur sont dévolus, prennent également sur eux de leur insuffler vie, par plus de phrasés, plus de variations de timbre, ou plus d'homogénéité de son. Il y a aussi de l'aridité dans les pages, généralement peu goûtées, de la Troisième Symphonie, comme dans cet Andante elegiaco central, où une lecture plus imaginative de l'orchestre aurait contribué à densifier le discours. Mais, heureusement magnifié par des cordes toujours à leur plus haut niveau, le Scherzo tout en glissades aquatiques est nettement plus saillant ; et plus encore que la liesse de tutti éruptifs – d'excellente tenue rythmique – on admire la poésie teintée d'ironie du dialogue naïf, presque gourd, des violoncelles et des contrebasses de l'Alla Tedesca.

Tous pressentaient, en la « Pathétique », l'apogée de la soirée, et même du cycle entier. Slatkin, avec une gestuelle particulièrement soignée, livre une vision stupéfiante du premier mouvement. Des tempi étirés lui permettent de sculpter en grand détail les phrases hachées du thème de l'Allegro, incertaines encore, tantôt empesées, tantôt craintives, si bien que c'est la réexposition de l'idée initiale, au terme d'un développement bouillonnant, qui devient le sommet véritable de la pièce. On reste admiratif devant la forme d'arche qui se dessine ainsi, embrassant toutes les idées ardentes que Tchaïkovski a disposées dans ces mesures. Après une Valse exquise, on reste extérieur à un troisième volet plus chthonien, là où on espérait une marche enfiévrée, déréglée. Mais le Finale retrouve toute sa noblesse désespérée. L'espérance et la prière de l'être souffrant font place à la vision glacée d'un tombeau. Le son des cordes se métamorphose peu à peu, se fait de plus en plus étranglé pour dépeindre l'effroi ; et lorsque meurt la dernière note tenue des contrebasses, on est presque gêné que seul le tapage des vivats puisse dignement saluer une interprétation si réussie.

Crédit photographique : © Cindy McTee

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