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Rhorer dirige deux raretés de Berlioz et Beethoven au TCE

Accompagné par son Cercle de l'Harmonie, la et trois chanteurs de renom, s'invite au Théâtre des Champs-Élysées pour présenter deux œuvres rares de compositeurs pourtant célèbres, avec d'abord la Messe Solennelle d', puis Le Christ au Mont des Oliviers de .

Composée par un jeune homme de vingt ans en 1824, la Messe Solennelle d' ne présente pas encore la maturité des futurs Grande Messe des Morts et Te Deum, mais déjà un style bien affirmé, et l'envie de remettre en cause les formes du passé. La partition, perdue pendant plus d'un siècle, est retrouvée seulement en 1992 à Anvers, pour être recréée l'année d'après puis enregistrée par John Eliott Gardiner et son Orchestre Révolutionnaire et Romantique. L'auditeur contemporain a donc pris l'habitude d'entendre dans cette œuvre des instruments anciens, et si le Cercle de l'Harmonie ne présente pas que des sonorités harmonieuses, notamment dans les cors à l'introduction – meilleurs ensuite –, il offre avec son diapason historique la possibilité d'attaques franches et rapides qui démontrent la modernité de la musique de Berlioz.

La , formation d'à peine quarante choristes, s'adapte parfaitement à cette lecture, sans jamais présenter une masse qui aurait risqué de dénaturer l'ensemble. Tous les groupes de voix se démarquent sans aucun problème, avec de beaux effets, comme l'intervention des altos dans la coda du Kyrie Eleison, qui rendent ici justice à la composition du compositeur en exposant avec évidence le besoin d'apporter à cet instant une autre texture pour supporter le reste du chœur. Des trois solistes, le plus utilisé dans l'œuvre est le baryton, ce soir un engagé et à la projection ouverte, qui semble cependant plus chanter un opéra qu'une messe – sentiment qui devient flagrant dans la dernière partie, lorsqu'au Domine salvum, il regarde et invective presque le ténor , comme s'il était le sculpteur Fieramosca en plein duo de l'acte II lorsqu'il provoque Cellini en duel.

Au retour d'entracte, chœur, orchestre et chanteurs retrouvent la scène pour le Christus am Ölberge de Beethoven. Cette œuvre méconnue est pourtant composée par le compositeur alors qu'il a trente ans, et a déjà de nombreux chefs-d'œuvre à son actif, dont la Sonate « Clair de Lune » écrite la même année. L'oratorio sur le Christ n'est pas sa pièce la plus inspirée, mais il a l'avantage de présenter un Beethoven avec chœur et voix montrant un style vocal qu'il réutilisera dans la décennie pour la première version de Léonore, notamment le trio vocal particulièrement opératique, et jusqu'aux ultimes Neuvième Symphonie et Missa Solemnis. apporte à l'œuvre une dynamique louable, même si dans cette musique déjà mature, l'orchestre pèche plus que dans Berlioz par ses sonorités, surtout aux cuivres lorsqu'ils doivent jouer piano.

Le rôle vocal principal revient maintenant au ténor, et s'il était apparu rapidement dans la messe, on peut à présent bénéficier à plein de la qualité de l'Allemand , superbe dans la diction du texte autant que dans le timbre et la clarté de la ligne de chant. La soprano norvégienne est elle aussi plus sollicitée ; elle a même fort à faire avec une partition extrêmement complexe dans les hauteurs et les vocalises – fortement influencées par le dernier singspiel de Mozart –, à laquelle son timbre coloré et son agilité s'adaptent parfaitement. ne possède pas un allemand aussi précis, mais il a lui aussi une prononciation extrêmement intelligible, avec même trop de consonnes pour la langue de Goethe, et son style opératique s'adapte cette fois très bien à l'oratorio, pour une prestation globale très applaudie par le public présent ce soir dans la salle de l'avenue Montaigne.

Crédits photographiques : © Julian Laidig; © Felix Broede

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