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Vienne à Luxembourg avec Herbert Blomstedt

Blomstedt est devenu un des chefs favoris de l', et on comprend bien pourquoi.

Si la Philharmonie de Luxembourg présente certes chaque année une saison prestigieuse d'orchestres invités, la venue de l' est tout de même un événement, trois ans et demi après son premier passage dans la belle salle construite par Christian de Portzamparc.

Cette fois, c'est qui dirige un programme qu'il a déjà donné le week-end précédent pour les concerts d'abonnement de l'orchestre à Vienne. Cette soirée consacrée aux marges géographiques du romantisme germanique est la reprise d'un programme qu'il avait déjà proposé en 2016 avec l'Orchestre philharmonique de Berlin : Blomstedt a beaucoup défendu la musique de son compatriote ; l'orchestre, lui, n'avait joué ce compositeur qu'une seule fois, en… 1921. Autant dire qu'il trouve en Blomstedt un mentor qu'il ne peut que suivre.

Les première mesures de sa Symphonie n°3 – ces ondulations des cordes dans le grave qui ouvrent la partition – rappellent immédiatement les qualités de l'orchestre – avec une quinzaine de musiciennes, sans doute une sorte de record pour eux ; mais c'est plus encore la manière dont Blomstedt se fait l'avocat de Berwald qui passionne ici. Les originales couleurs de l'orchestre de Berwald, soulignées par les Philharmoniker, sont naturellement mises à profit, mais plus encore c'est le parcours que suit Blomstedt qui rend son interprétation passionnante : oui, ainsi interprétée, cette musique mérite bien le titre de Singulière que son compositeur lui avait donnée, en français dans le texte.

La tragique et brahmsienne Symphonie n°7 d' fait quant à elle partie du répertoire courant de l'orchestre depuis un quart de siècle. Est-ce la raison qui la rend un peu moins enthousiasmante, l'orchestre viennois ayant interposé sa propre tradition interprétative entre l'œuvre et les intentions du chef ? Il y a beaucoup de choses passionnantes dans ce qui est proposé aux auditeurs, dans une approche qui n'entend visiblement pas surcharger l'expressivité romantique et donner toute leur place aux riches éléments de construction ; le drame est présent, l'intelligence de l'ambition symphonique, mais on ne peut s'empêcher de penser que, par moments, l'orchestre est trop enivré de ses propres couleurs pour suivre le chef autant que dans la première partie.

Après ces deux pièces substantielles, annonce en bis un « cadeau de choix depuis Vienne », la Valse de l'Empereur de : rares sont les bis qui méritent le commentaire, et la manière dont l'orchestre joue ce répertoire en pilotage automatique chaque année lors du concert du Nouvel An amoindrit quelque peu la curiosité – bien à tort : l'orchestre s'y montre inhabituellement curieux des voies nouvelles que lui fait emprunter Blomstedt – l'originalité de sa démarche, toute faite de décalages, de contrastes, de rythmes alanguis alternant avec une rigueur rythmique presque militaire, ne permet pas à l'auditeur de se laisser porter aux joies simples du rythme à trois temps, et pourtant, quelle séduction, quel parfum puissant, quelle intelligence stylistique !

Crédit photograhique : © Martin U.K. Lengemann

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