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Cendrillon à l’Opéra Bastille : Hollywood sur Seine

Les spectacles de fin d'année à l'Opéra national de Paris déploient la magie et la brillance des contes de Noël et cette année, en ballet comme en lyrique, c'est le conte de Cendrillon, en version Rossini pour l'opéra et en version Noureev pour la danse, qui a été choisi.

On peut se demander si la reprise d'une production Noureev souvent vécue comme un peu poussive peut parvenir à trouver un second souffle avec des interprètes n'ayant pas connu le chorégraphe de son vivant. Le pari semble réussi quand on a les danseurs incroyables qui composent cette distribution. En premier lieu, qui respire la grammaire de Noureev comme personne (alors qu'il faut bien concéder le caractère absolument indansable et peu naturel de celle-ci). Elle a cette capacité stupéfiante d'une fluidité et d'une souplesse dans le délié qui reflètent sa très grande intelligence artistique. Les équilibres sont vaillants, comme si tenir sur pointe était aussi évident que de marcher. Enfin, avec le chic d'une grande dame, l'actrice parvient à faire évoluer son personnage de la relative modestie du premier acte à la magnanimité qui clôt l'aventure.

Son partenaire, , fait une prise de rôle remarquable. Son physique avantageux le conduit à être un partenaire très efficace pour déjouer les vilénies de la chorégraphie et la construction de son personnage (qui n'est pas aussi fouillé que celui de Cendrillon) reste uniforme mais brillante. Dans les deux sœurs, couple que l'on peut trouver sympathique mais parfois trop caricatural, Myriam Ould Braham et s'amusent en étirant leurs possibilités naturelles vers le grotesque : cela fait sourire mais guère plus, l'ingratitude des sœurs de Cendrillon ne les conduisant à peu près qu'à de la sournoiserie. En revanche, Aurélien Houette, décidément apprécié dans les rôles de marâtre (on se souvient de sa Mère Simone dans la Fille Mal Gardée) est assez fin dans le rendu de son personnage avec la surprise qu'occasionnent souvent les hommes s'essayant aux pointes et leurs exploits techniques : quel travail, au-delà d'être un acteur, cela doit-il représenter que de s'essayer aux pointes habituellement dévolues aux filles !

Le spectacle s'agrémente des rôles de demi-solistes agréables et c'est surtout Sae-Eun Park et Fanny Gorse, respectivement l'Automne et l'Hiver, qui auront attiré l'attention, à défaut que l'on soit totalement séduit par Emilie Cozette ou Charline Giezendanner (l'Été et le Printemps).

Le ballet Cendrillon, dont Noureev a transposé le conte dans le monde du cinéma, est repris une à deux fois par décennie : il reste manifestement au répertoire de la maison de danse. On y revient alors avec la nostalgie d'y avoir aimé certaines Étoiles très prestigieuses il y a fort longtemps et avec l'idée qu'on espère ne pas revoir trop fréquemment cette production non plus, malgré la musique de Prokofiev et certains danseurs Étoiles qui s'illustrent aujourd'hui encore brillamment.

Crédit photographique : , © Yonathan Kellerman

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