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Schubert au pianoforte par Andreas Staier à Metz

Le travail du musicien sur l'instrument mérite le respect, au prix d'une richesse interprétative limitée.

L'histoire du piano vit son apothéose continue, en forme de conte de la mondialisation : avec la généralisation des Steinway comme équipement standard de toutes les salles de concert du monde, une perfection était atteinte, d'autant plus précieuse qu'elle offrait ainsi aux stars du clavier la garantie de pouvoir retrouver leurs repères, sans difficultés majeures, dès leur descente d'avion, où qu'ils soient dans le monde : d'aéroport en aéroport, de Steinway en Steinway. Heureusement, tous les musiciens ne croient pas à cette fiction, et pianos et pianofortes anciens ne sont plus si rares au disque comme à la scène.

Celui qu' joue ce soir à l'Arsenal ne nous est hélas pas présenté : il affiche toutes les inégalités de timbre et toutes les difficultés d'articulation qu'on peut en attendre, graves volontiers percussifs ou au contraire charbonneux, aigus variant entre sonorités campanaires et timbre un peu fluet favorisant la fluidité du discours sur l'articulation. fait preuve d'une grande inventivité pour tirer parti des possibilités offertes par l'instrument, souvent avec brio, parfois avec des approximations ; les difficultés spécifiques à l'instrument l'excusent, mais la fluidité n'en pâtit pas moins pour autant. Le grand voyage schubertien de la sonate D. 960 se trouve aussi freiné par une tendance au maniérisme qui, elle, n'est pas due à l'instrument : les abîmes ne s'entrouvrent pas ici, à l'image du troisième mouvement d'une belle rondeur, mais d'une trop univoque joliesse qui en fait une pièce de salon. Tout l'inverse d'un András Schiff qui, sur Steinway, sur Bösendorfer, sur pianoforte, sait faire de l'instrument son allié pour une compréhension intime et passionnée du piano schubertien.

Crédit photo : © Josep Molina

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