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Mariss Jansons dirige l’Orchestre Philharmonique de Vienne au TCE

Alors qu'on célèbre à Vienne le 150e anniversaire du Wiener Staatsoper, les Wiener Philharmoniker restent fidèles à leur traditionnel rendez-vous parisien, avenue Montaigne, dirigés aujourd'hui par un fatigué dont l'interprétation peine à convaincre.

Il faut reconnaître que depuis 1924 les liens sont forts entre les Wiener Philharmoniker et le Théâtre des Champs-Élysées, renforcés par une résidence exceptionnelle établie depuis 1990. Chacun de leur passage prend, dès lors, valeur d'évènement musical, conforté encore pour l'occasion par la présence sur l'estrade de . Immense chef, comptant depuis des années parmi les plus grands, c'est à petits pas comptés que le célèbre chef letton, aujourd'hui âgé de 76 ans, s'achemine vers le pupitre pour diriger, le plus souvent assis, ce concert de gala au programme très romantique associant la Symphonie n° 1 de et la Symphonie fantastique d'. Deux œuvres bien connues, toutes deux portées par l'amour où la vision printanière de l'une répond aux visions hallucinées de l'autre dans un contraste saisissant qui fait tout l'intérêt de ce programme… mais ce soir, hélas, les héros sont fatigués !

Si les performances solistiques de la prestigieuse phalange viennoise ne sont pas en cause, c'est en revanche la lecture que fait de ces deux œuvres qui prête à discussion par un constant manque de dynamique, par des tempi trop lents et par des ruptures rythmiques répétées et inopportunes. Point d'enthousiasme, ni de frissons pour ce concert qui se résume rapidement à un bel exercice d'orchestre….

La Symphonie n° 1 de , composée en 1841, toute imprégnée de joie et d'amour au lendemain de son mariage avec Clara, apparaît, ici, bien terne, appliquée, musicalement sans faute, mais aussi sans saveur, dépourvue d'une quelconque émotion. Le premier mouvement, L'éveil du printemps, fait valoir de magnifiques cordes pénalisées par un phrasé plus lourd que majestueux. Le second, Le Soir, plus lyrique met en avant un splendide pupitre de violoncelles. Le troisième, Joyeux compagnons, fait la part belle à la petite harmonie, tandis que le quatrième, Adieu au Printemps, sans fantaisie, se résume aux belles prestations de la flûte et du cor.

Pour qui se souvient de la lecture magistrale et innovante de Sir John Eliot Gardiner à la tête de son Orchestre Révolutionnaire et Romantique, ou encore de celle, très engagée, de Valery Gergiev face à l'Orchestre de Paris, cette Symphonie fantastique conduite par Mariss Jansons paraitra bien pâlichonne et apathique, sans relief et exempte de toute sensualité. Si Rêveries et Passions ne semble se consacrer qu'aux rêves, favorisant un lyrisme mélancolique mais oubliant le drame, usant de toutes les ressources des cordes, Un Bal manque d'allant malgré l'élégance des arpègements de harpes, Scène aux champs bénéficie d'une spatialisation sonore du plus bel effet dans le dialogue du cor anglais, du hautbois et des timbales, tandis que Marche au supplice retrouve enfin un peu de dynamisme dans sa progression inexorable scandée par bassons, timbales et cuivres se déployant sur un phrasé plus solennel qu'effrayant. Nonobstant sa lenteur, Songe d'une nuit de sabbat est, en revanche, le mouvement assurément le plus réussi, par sa tension, par sa clarté, par son impeccable mise en place, par son foisonnement de timbres (petite clarinette, piccolo, cloches) auxquels s'associent les glapissements des cuivres, les glissandi des bois, dans une orgie sonore qui conclut de façon très théâtrale ce rendez-vous en demi-teinte.

Crédit photographique : Mariss Jansons © Marco Borggreve

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