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Les œuvres rares de Pfitzner et de Braunfels à l’honneur chez Hyperion

Les deux œuvres qui composent le soixante-dix-neuvième volume de la collection “The Romantic Piano Concerto” du label anglais ne sont pas des “concertos” au sens traditionnel du terme. Leur ampleur symphonique, l'absence de longs thèmes mélodiques développés au piano, les circonstances historiques, également, les condamnèrent à l'oubli après la Seconde Guerre mondiale.

Créé en 1923, à Dresde, sous les doigts de et la baguette de , le Concerto de se déploie comme une fresque grandiose surchargée harmoniquement (“Pompeusement, avec force et vitalité” est-il indiqué sur la partition). L'ombre de Brahms pèse lourdement et ainsi que l'orchestre font au mieux pour en alléger la pâte sonore. Celle-ci se cuivre de plus en plus, rappelant les poèmes symphoniques de Strauss. Dans la première partie, véritable nocturne tragique, le piano assure la fusion entre les thèmes. La virtuosité prend le pas dans le second mouvement, le plus marquant et le plus bref des quatre, grâce au resserrement de l'écriture qui joue de la pulsation des rythmes. Après cette jubilation sonore, voici le temps de la méditation dans le troisième mouvement. Les climats des œuvres tardives de Brahms et les fanfares de cuivres des symphonies de Mahler imposent leur massivité. L'exubérance du finale s'inspire à nouveau des fresques de Strauss. N'eût-il pas été préférable que le chef et le soliste donnent davantage d'impulsion et créent des tensions plus abruptes dans cette musique si chargée d'intentions ?

enregistra l'œuvre en 1943. Depuis, plusieurs versions ont vu le jour. On recommandera celle de avec et la rutilante ; le soliste ne s'y laisse pas réduire au simple rôle de faire-valoir (Hänssler Profil). En second choix, la présente lecture est fort honorable, devançant celles de Wolf Harden et (Marco Polo) et de Wolker Banfield avec (CPO).

Sauf erreur de notre part, Tag- und Nachtstücke pour orchestre et piano obligé de est enregistré pour la première fois. Tardivement redécouverte, la partition fut créée en juillet 2017 sous les doigts de et la baguette de . De son côté, la pianiste nous a déjà fait apprécier chez Capriccio, d'autres pièces concertantes du compositeur allemand dont les mélomanes connaissent avant tout l'opéra Die Vögel (Decca). En cinq mouvements, Tag- und Nachtstücke fut achevé en 1934. Plus avant-gardiste que la pièce de Pfitzner, la partition de Braunfels emploie le piano comme un instrument coloriste essentiel dans les atmosphères évanescentes du premier mouvement. Les harmonies employées rappellent celles d'un Zemlinsky et les thèmes qui déconstruisent la forme concertante classique sont habilement enchevêtrés. Le piano ne développe pas de grandes mélodies, mais des suites d'accords et d'arpèges qui enrichissent une écriture mordorée, vibrante et sensuelle à la fois. dose avec beaucoup de subtilité les changements de couleurs. Le caractère impressionniste est plus marqué dans le second mouvement, une course doucement… haletante ! C'est l'esprit mendelssohnien qui prévaut alors que le troisième mouvement se veut ironique, d'une ironie rythmique « à la Dukas”. Le clavier pétille de vie, préservé par la direction vigilante de . L'Adagio expose la seule mélodie développée du clavier, bientôt submergée par un chromatisme digne des premiers opus de Schoenberg. Nous restons à Vienne dans le finale triomphant et au caractère quasi-mahlérien. On a déjà oublié la présence du piano obbligato qui a disparu d'une bonne partie de cette partition inclassable.

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