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Lucas Debargue en récital à la Philharmonie de Paris

Le pianiste étonne autant qu'il séduit… En témoigne son dernier récital à la Philharmonie de Paris dont le programme, haut en couleur, associe, de façon surprenante, , et .

Déroutant pianiste qu'on dit autodidacte, révélé en 2015 par le Prix de la Critique au concours Tchaïkovski de Moscou, menant depuis une fulgurante carrière, à la scène comme au disque, capable de remplir la grande salle de la Philharmonie de Paris par l'attrait irrésistible de son pianisme atypique, passionné, virtuose et engagé, tant physiquement que mentalement, et par l'originalité de ses interprétations, souvent fantasques et marginales, mais toujours riches en couleurs.

occupe toute la première partie, avec un florilège de 11 sonates choisies parmi les 52 (sur 555 composées par le maître italien !) que vient de graver pour le label Sony. Une interprétation qui pourra sans doute choquer les puristes par ses accents romantiques utilisant force de rubato et de suspensions rythmiques. Tout ici est au service de l'expressivité, de l'émotion et de la couleur, alternant badinerie, drame, exubérance joyeuse, dans une palette dont l'étendue semble parfois se faire, hélas, au détriment d'une certaine cohérence d'ensemble…

Compositeur phare du post-romantisme russe, contemporain de Rachmaninov et Scriabine, est depuis longtemps un des compositeurs de prédilection du pianiste français. Rarement jouée en concert, défendue en leur temps par Eugene Istomin et , sa Sonate op. 22, composée en 1910, est une œuvre âpre, d'une grande complexité rythmique et polyphonique, de caractère sombre et tourmenté, qui associe la violence de Scriabine au lyrisme de Rachmaninov. nous en offre une lecture faite d'une virtuosité époustouflante où s'exerce avec brio son sens des nuances et ses capacités de conteur qui trouve toutefois ses limites dans les passages les plus lents où une certaine difficulté à maintenir la continuité du discours semble se faire sentir.

Liszt, comme une évidence, conclut ce beau récital avec Après une lecture du Dante, titre éponyme du poème de extrait des Voix intérieures. Fantasia quasi sonata où s'affrontent les forces du Bien et du Mal dans un combat homérique retraçant le chemin vers le Salut, après avoir parcouru toutes les nuances du Purgatoire. Mêlant de longs silences et les cris des damnés dans une véritable épopée aux accents foudroyants qui marque le début de la quête mystique lisztienne, Lucas Debargue y déploie une énergie intense portée par un souffle continu, convaincant de bout en bout.

Trois « bis » achèvent de conquérir le public : Scarlatti, Sonate K 32 en ré mineur, Lucas Debargue, Toccata d'après un prélude de Bach en do mineur et la Ballade n° 2 en si mineur de Liszt.

Crédit photographique : Lucas Debargue © Xiomara Bender

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