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Kevin Kenner en récital à Łódź pour célébrer l’indépendance de la Pologne

À Łódź, le jour de l'indépendance de la Pologne, , l'un des pianistes favoris du public local, donne un récital dont le programme comprend des œuvres de et d'.

Ce programme proposé le jour le plus significatif de l'année en Pologne paraît plus qu'évident. D'abord, , le premier compositeur polonais, dont la musique évoque en large le folklore national, et qui, en plus, est le patron du plus ancien concours international de piano, pour lequel remporta le 2e prix en 1990 (le 1er prix n'ayant pas été attribué). Ensuite, Paderewski : pianiste, compositeur, homme d'État et diplomate polonais, dont les efforts successifs furent couronnés par le retour de la Pologne sur la carte de l'Europe en 1918. Kenner est un grand propagateur et défenseur de sa musique, aussi bien pour le concerto que pour les pages pour piano seul.

Ce soir, se produit dans la ville de Łódź, une ancienne métropole textile qui tient une place non négligeable dans l'histoire de la musique. C'est ici que sont nés, entre autres, Arthur Rubinstein, Alexandre Tansman, Paul Kletzki, Grażyna Bacewicz et Miłosz Magin. Le récital commence par une poignée de Mazurkas, présentées telles des esquisses légères : comme improvisées, profondément poétiques et dûment rythmées. Puis, l'Andante spianato et Grande Polonaise brillante op. 22 est, sous les doigts de Kenner, d'une émouvante finesse, éthéré, mélodieux et d'une finition soigneuse dans la cantilène. Ensuite, le soliste aborde la Valse op. 42 d'une manière qui conjugue élégance de salon avec virtuosité tantôt folle et nerveuse, tantôt retirée. Avant l'entracte, il offre encore les trois premiers morceaux du cycle Six humoresques de concert de Paderewski : le Menuet en sol majeur op. 14 n° 1, la Sarabande en si mineur op. 14 n° 2 et la Caprice en sol majeur op. 14 n° 3. Les trois pièces suivantes de ce cycle clôturent la deuxième partie du récital : la Burlesque en fa majeur op. 14 n° 4, l'Intermezzo polacco en ut mineur op. 14 n° 5 et la Cracovienne fantastique en si majeur op. 14 n° 6. Nous avons l'impression que Kenner se sent plus à l'aise dans ce répertoire que dans les morceaux de Chopin. Sa subtile prestation saisit par la variété d'ambiances et de couleurs, tout comme elle impressionne par une articulation riche, laissant les aigus sonner très nets, voire brillants et cristallins.

Pour les Chopin donnés après l'entracte, nous nous délectons, encore une fois, de la mise en valeur du côté lyrique de ces partitions, d'une extraordinaire douceur (le Nocturne « Lento con gran espressione »), de la simplicité des phrasés (la Fantaisie-Impromptu op. posth. 66), tout autant que de changements de tempo délicats, qui ne déconcentrent pas et qui ne brisent pas la cohérence de ces interprétations. En revanche, il est dommage qu'un nombre de menus accrocs ternissent çà et là la clarté des plans, et que quelques phrasés hâtifs empêchent l'ampleur de la respiration. Aussi, on aurait aimé percevoir un forte plus puissant et plus profond dans le climax du Scherzo op. 54.

Deux bis retentissent avant la fin de la soirée : le Nocturne en si bémol majeur op. 16 n° 4 de Paderewski, puis la Polonaise « héroïque » op. 53 de Chopin. Si le nocturne nous dévoile une conception purement poétique, la polonaise galvanise par la bravoure, le sens du panache (quelles octaves à la main gauche dans le trio !), la splendeur et la majesté, ainsi que toutes ces subtilités qui évoquent les traits de l'âme slave, mais sans l'intensité qui caractérisait l'exécution de Leif Ove Andsnes.

Crédit photographique : © Marcin Stępień

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