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Gautier Capuçon et Yuja Wang au Grand Théâtre de Provence

Pour la venue de  et  au Grand Théâtre de Provence, le programme éclectique, celui de leur dernier CD chez Erato, mettait à l'honneur Franck et Chopin.


Composée à l'origine pour piano et violon, la Sonate de Franck fait partie des œuvres incontournables du répertoire chambriste. Victime de son succès, elle a été transcrite pour d'autres instruments dont le violoncelle. Sa tonalité naturellement plus grave résonne comme un murmure dès l'entame de l'Allegretto. Un long phrasé instaure un climat en demi-teinte pour mieux dévoiler une ligne instrumentale d'une beauté poétique. Le piano de  est porté par un toucher délicat. L'acoustique sèche de la salle dessert pourtant ce premier mouvement. Le volume est déséquilibré côté cordes et cela ne permet pas d'apprécier pleinement le dégradé des dynamiques. L'Allegro met en lumière un dialogue harmonieux entre le Gofriller et le piano aux accents fiévreux. Le Recitativo avec son tempo modéré offre une vision assez sage, sans fougue. Elle nous touche néanmoins avec son chant proche d'une beauté élégiaque et qui atteint une plénitude expressive lors du deuxième thème. propose un pianisme imagé et empreint de couleurs. Tous deux sont au diapason dans le fameux climax mélancolique dont la passion reste ici contenue.

Le duo montre une autre facette à travers l'Introduction et Polonaise brillante de Chopin, son œuvre de jeunesse, composée lorsqu'il était encore au Royaume de Pologne. Le caractère opératique est frappant. Une touche romantique puis facétieuse dans la Polonaise vient éclairer la spontanéité digitale de la pianiste ainsi que le violoncelle d'une expression flexible à souhait.

Seize années séparent cette pièce de la Sonate que nous entendons en deuxième partie, la dernière partition qui fut publiée du vivant de Chopin. Par son caractère, cette sonate révèle des traits novateurs de l'écriture chopinienne. Les accents tourmentés et les humeurs changeantes du premier mouvement évoquent Schumann. Le jeu de la pianiste est puissant mais aussi délicat et exalté. L'archet de Capuçon est fluide, en épousant les contours d'un phrasé ample et en libérant  notamment dans le Scherzo , un lyrisme soutenu qui devient par moments planant. Instants transcendés avec le sublime Largo dont l'atmosphère, mélancolique, transpercée d'une indicible tristesse, nous émeut. Aussi enlevé que sensible, le Finale, Allegro avec son rythme de tarentelle sera quant à lui donné tout en conformité avec l'esprit de la présentation des mouvements précédents.

Deux bis sont offerts. Tout d'abord, le Grand tango de Piazzolla dont les sonorités suggestives et l'écriture virtuose permettent aux musiciens de briller. Puis, le Cygne de Saint-Saëns, d'une poésie irrésistible, vient clore un récital tout en crescendo.

Crédit photographique © Fadi Kheir

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