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Programme russe aussi pour Daniele Gatti avec les Berliner Philharmoniker

Une semaine après Kirill Petrenko, est invité par les Berliner Philharmoniker pour un nouveau programme russe : après le ballet Apollon Musagète de Stravinsky, il permet de retrouver dans la Symphonie n° 5 de Chostakovitch la forte pression déjà entendue cinq ans plus tôt dans la Dixième.


L'entorse qui l'avait forcé à diriger assis à Rome en décembre semble être guérie. C'est donc debout, sans partition, que introduit le ballet Apollon Musagète d'.

Grand admirateur du compositeur russe émigré en occident, Gatti devait proposer en octobre dernier l'opéra Rakes Progress dans la capitale italienne ; il a dû se contenter de Pulcinella le 19 décembre, diffusé sur YouTube. En cette année 2021, le chef revient face aux Berliner Philharmoniker avec une autre partition néoclassique, Apollon, interprétée dans la même version révisée de 1947 que celle enregistrée par Karajan avec l'orchestre berlinois à la fin de sa vie. Pour ce ballet ne sont évidemment présentent que les cordes, avec pour premier violon, remarquable dès son premier solo, la Variation d'Apollon, introductive d'un second tableau, six fois plus long que le premier, limité à la Naissance du dieu grec. Rejoint par le second premier violon, Luíz Fïlíp Coelho, Kashimoto maintient une ligne beaucoup plus sobre qu'à son habitude, dans la pleine continuité du style initié pour l'ensemble par le chef italien. Le Pas d'action éclaircit l'atmosphère avec plus de légèreté, toujours contenue dans les sonorités roides recherchées par le compositeur, revenu à un style plus retenu après ses grands ballets du début de siècle. Le solo du violoncelle de Martin Löhr prolonge cette atmosphère pour la Variation de Calliope, avant la reprise des trente-et-une cordes qui conclut l'ouvrage.



En seconde partie, retrouve un compositeur qu'il a peu dirigé, mais pour lequel on se rappelle la puissance qu'il avait su insuffler lors d'une Symphonie n° 10 d'une incroyable tension avec la Staatskapelle Dresden en 2015, puis sept mois plus tard à Milan avec l'Orchestra del Teatro alla Scala. Cette Cinquième est abordée à Berlin avec la même approche, l'orchestre pressuré par la direction de Gatti ramenant aux sombres années staliniennes dont provient en droite ligne cette partition. Quelques têtes ont changé parmi les Berliner depuis les concerts des deux mois précédents, et plutôt que Jonathan Kelly, c'est aujourd'hui Albrecht Mayer qui tient le premier solo de hautbois. Avec cette forte tension se développe tout le Moderato, jusqu'à son explosion, toujours très contrôlée. De cette vision sombre, aujourd'hui rare en concert depuis la mort des grands maîtres russes dont Rozhdestvensky, découle ensuite l'Allegretto, dans lequel se remarque particulièrement des timbales plus fermes que lors des précédents concerts de la formation. Plus impressionnant encore est le Largo, où l'on retrouve le geste lent et construit du chef, qui prend le temps de développer une densité sonore jamais relâchée. Là encore, le solo de hautbois fascine dans sa partie magnifiquement contemplative, suivi par la clarinette (), les contrebasses, puis la flûte (), tous soutenus par les tremolos glaçants des violons.

L'énergie dégagée du finale, Allegro non troppo, nous laisse entrevoir ce qu'aurait été le rendu pour les auditeurs s'ils avaient été en salle, et laisse espérer d'autres interprétations aussi réussies pour d'autres symphonies plus rares du maitre russe.

Crédits photos : © Berliner Philharmoniker

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