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Avec un an de retard, célébrations beethovéniennes à Metz

Enfin, une mise en scène de Fidelio pour l'anniversaire Beethoven ! Message universel pour un opéra au thème malheureusement intemporel.

La pandémie que nous continuons à traverser aujourd'hui aura considérablement gâché les festivités du 250ᵉ anniversaire de la naissance de Beethoven. Si l'on ne compte pas le nombre de productions de Fidelio à avoir été annulées, on se réjouira d'avoir pu applaudir à l'Opéra-Théâtre de Metz Métropole cette nouvelle mise en scène du chef d'œuvre du compositeur allemand. Clairement, c'est sous le signe de l'universalité que marque sa production, transformant ce qui devait être au départ un énième opéra de sauvetage inspiré d'un fait réel, en une dénonciation de toutes les violations faites au respect fondamental des droits de l'homme. Le livret, d'ailleurs, a été quelque peu dépoussiéré dans ses dialogues parlés afin d'universaliser le propos. Des haut-parleurs signalent l'arrivée du gouverneur dans une prison qui pourrait, hélas, se trouver n'importe où dans le monde. Les accessoires restent en nombre limité (une table, quelques tabourets, les livres de compte de Rocco), la scénographie étant essentiellement confiée, en tout cas au premier acte, à une habile conception vidéo destinée à illustrer de diverses manières la thématique de l'enfermement puis, à la fin, de la libération. La beauté visuelle des images ressort encore davantage au deuxième acte, avec la création d'un superbe mur de vieilles poupées au pied duquel gît Florestan. Symboles de tant de vies martyrisées, ces figures inanimées évoquent également les rêves brisés de Marzelline, laquelle au premier acte berce dans ses bras la poupée qui tombera dans le cachot de Florestan au deuxième. Comme souvent dans les mises en scène de et des acolytes habituels (Patrick Méeüs aux lumières, Giovanna Fiorentini aux costumes), c'est par la force de la dimension esthétique que passe le message idéologique.

Sur le plan musical, la plus grande satisfaction provient de l'orchestre et des chœurs. Répartis entre la fosse et le devant du parterre, les musiciens emplissent une grande partie de l'espace de la salle, corrigeant de ce fait les défauts acoustiques d'une salle aux réverbérations généralement plutôt sèches. La lecture analytique de , que l'on souhaiterait parfois plus fougueuse, détaille à merveille des subtilités d'écriture qui passent souvent inaperçues en temps normal. Renforcé pour l'occasion, le chœur donne lui aussi une très belle prestation. On aura noté une certaine fatigue vocale chez quelques solistes, peut-être due à l'effort supplémentaire qui leur est demandé afin de passer un orchestre lequel, contrairement aux usages, n'est pas totalement confiné dans la fosse. Les voix plus légères, notamment le soprano frais et cristallin de , sont ainsi mises quelque peu en difficulté. (Jaquino) parvient mieux à projeter son instrument. Fatigue aussi chez les trois clés de fa, même si le métier de lui permet de camper un Rocco à la fois inquiétant et débonnaire. Imposant de par sa stature physique, est quant à lui un Pizzaro qu'on n'aimerait pas croiser sur son chemin et s'acquitte dignement du rôle finalement assez épisodique de Don Fernando, même si c'est à lui qu'échoient certaines des plus belles phrases de l'opéra. Des deux protagonistes, on préfèrera , habitué des emplois lourds de ténor qu'il chante dans les plus grandes salles du monde, même si son chant manque parfois de subtilité. Sa partenaire possède certes une ample voix dramatique, mais l'écriture crucifiante du rôle de Leonore met durement à l'épreuve la justesse de l'instrument dans les plus hautes notes de la tessiture.

Terminée à dix minutes du couvre-feu en rigueur, cette belle représentation aura en tout cas enthousiasmé un public visiblement heureux de retrouver sa salle et les équipes qui, d'année en année, proposent des spectacles habiles, intelligents et cohérents.

Crédit photographique : , et (photo 1) ; , Franz Hlawata, et (photo 2) © Luc Bertau – Opéra-Théâtre de Metz Métropole

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