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Le Comte Ory en spectacle d’ouverture à Metz

Plateau riche et équilibré pour une mise en scène drôle, légère et fluide de l'ouvrage comique de Rossini.


Point de réécriture postmoderne ou de transposition anachronique pour cette proposition très « premier degré » du Comte Ory. La mise en scène de assume crânement le Moyen-Âge de pacotille dans lequel se situe l'intrigue de l'ouvrage, multipliant gags, canulars et actions farcesques : les montures en bois avides de fourrage, les chapeaux coniques des femmes distributeurs de mouchoirs en papier, les caresses intimes qui déclenchent les rires de l'assistance, autant d'ingrédients qui assurent le plaisir et la bonne humeur garants du succès de la soirée. Point de discours moralisateur dans le sous-texte à l'encontre d'un prédateur sexuel qui pourrait nous rappeler certaines histoires contemporaines plus ou moins récentes… Le parti pris est clairement d'assumer la vitalité et la verve d'une œuvre qu'il serait absurde, on en convient, de priver de son irrésistible drôlerie. Dans cet univers loufoque, la figure du comte Ory émerge sous ses aspects les plus enchanteurs et les plus charismatiques. Le second degré s'installe néanmoins quand il s'agit d'aborder l'auto-parodie et de rire des conventions du genre de l'opéra, notamment dans le traitement de la vocalité. Les chanteurs se prêtent de bon gré au jeu de l'auto-dérision, n'hésitant pas à se mettre en danger pour servir les intentions de la mise en scène.

Le plateau réuni sur la scène de l'Opéra-Théâtre de l'Eurométropole de Metz, parfaitement équilibré, est de grande qualité. On notera tout particulièrement la présence rayonnante de la soprano , qui fait valoir dans le rôle de la comtesse Adèle un instrument souple, long, fruité et relativement puissant, davantage soprano lyrique que colorature même si elle a toute l'agilité des voix plus légères. À ses côtés, est elle aussi idéale en Isolier, dont elle possède à la fois le physique androgyne et la voix de mezzo aigu, particulièrement étendu dans les hauteurs. Doté d'une véritable voix de tenore di grazia, agréablement timbrée quoique relativement peu volumineuse, propose du héros éponyme un portrait tout à fait charmeur et attachant dans ses débordements libidineux. Fier d'un timbre agréablement mordant, le baryton argentin incarne un fringant Rimbaud, à la diction française étonnamment limpide. Cette qualité n'est pas partagée pas la basse , bien chantante mais un peu fâchée avec la langue française dans le rôle assez peu inspirant, il est vrai, du gouverneur du comte. On n'oubliera pas le mezzo riche et puissant de , Ragonde moins caricaturale que ce que l'on voit d'habitude sur nos scènes. Le Chœur de l'Eurométropole de Metz, particulièrement à l'aise dans cette partition vivante et enjouée, contribue à l'ambiance de liesse générale. Dirigé avec précision et rigueur par la cheffe , l', réparti entre la fosse et les premières rangées du parterre, joue avec son professionnalisme habituel. La disposition des instrumentistes a notamment l'avantage de corriger l'acoustique généralement assez ingrate de la salle.

Crédit photographique : solistes et Chœur de l'Eurométropole de Metz (photo 1) ; Patrick Kaboungo, et (photo 2) © Arnaud Hussenot – Opéra-Théâtre Eurométropole de Metz

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