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Autour des voix baroques de Lully et Rameau pour Alpha

Après avoir mis en lumière Dumesny, haute-contre de Lully, , à la fois interprète et directeur de l'ensemble , propose Jéliote. De son côté, revient au sein du répertoire baroque qui l'a fait connaître après son triptyque autour de la musique française du XIXᵉ siècle.

On pourrait se dire qu'en mettant face à face le nouvel enregistrement « Passion » de accompagné de l', et celui de et son ensemble , intitulé « Jéliote, haute-contre de Rameau », on perpétue l'éternelle querelle des Lullystes et des Ramistes, avec la tragédie lyrique au centre de cette controverse esthétique qui démarra à la première moitié du XVIIIᵉ siècle.

Reconnaissons-le, le genre est naturellement une composante essentielle de ces deux propositions discographiques du : qu'il s'agisse d'un « opéra imaginaire » pour la soprano, élaboré par autour d'extraits de tragédies lyriques de Lully et de ces compositeurs qui se firent connaître après sa mort, soit Pascal Collasse (1649-1709), Henry Desmarets (1661-1741) et Marc-Antoine Charpentier (1643-1704) ; ou d'un parcours artistique retracé autour d'un interprète comme le propose avec le chanteur lyrique Pierre Jéliote (1713-1797), qui inspira Rameau mais aussi François Rebel (1701-1775), François Francoeur (1698-1787), Jean-Marie Leclair (1697-1764) ou encore Pierre-Montan Berton (1727-1780) – un air composé par le chanteur est également présenté dans ce disque.

Mais finalement, et tel que le retrace Benoît Dratwicki (directeur artistique du CMBV), auteur des notices de présentation de ces deux disques, le programme pour tourne autour de deux interprètes majeures de leur époque : « la » Saint Christophe qui enchaîna les grands rôles de reines, de mères, de magiciennes et de divinités à l'Opéra entre 1675 et 1682 ; et « la » Le Rochois qui lui succéda et enchaîna les triomphes à partir de 1683. Ce n'est donc pas des programmes autour de compositeurs, mais bien la volonté de faire entendre à l'auditeur des scènes emblématiques tirées du répertoire de trois chanteurs phares de la période baroque.

Pour ce faire, Alpha a naturellement choisi le fleuron du chant baroque français de la scène lyrique actuelle. Véronique Gens et Reinoud van Mechelen partagent un amour du verbe qui semble incommensurable au regard de la qualité – superbe – de la prosodie de la soprano, et de la clarté – idéale – d'émission du haute-contre. Pour ce dernier, le défi est double puisqu'à la tête de l'ensemble , il sait également séduire par une dynamique constamment renouvelée, mais surtout une palette de couleurs d'une belle finesse. De son côté, Luis-Noël Bestion de Camboulas n'est pas en reste avec l' : par les couleurs également, riches, mais aussi par une cohésion d'ensemble qui donne toute la force à ces pages musicales, renforcée par les Chantres du CMBV qui ne manquent ni d'ampleur dans chaque incarnation, ni de précision technique dans leurs interventions précises.

Le choix de l'un, soit cinq actes retraçant les émois les plus fabuleux de deux interprètes féminines (« L'appel des enfers », « Malheureuse mère », « Cruel Amour », « Tranquille sommeil, funeste mort », « Médée furieuse »), et le choix de l'autre, de retracer chronologiquement une carrière artistique en quatre étapes (« Les débuts en deuxième plan 1733-1741 », « La percée, les premiers rôles 1741-1750 », « La fin à l'Opéra 1750-1755 », « Un retour à le cour 1762-1765 »), permet de proposer une alternance d'airs plus ou moins connus, alimentant l'intérêt musical de l'auditeur par la diversité des propositions impulsée par cette ligne éditoriale d'une programmation musicale exaltante, tout comme l'interprétation vocale et orchestrale qui la porte. Deux merveilles !

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