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Un demi-siècle pour 2e2M

Opus 2 de cette édition-anniversaire (1972-2022) qui met au centre du programme une des pièces du compositeur et fondateur de l', , qui nous a quittés en 2020.

C'est , jeune trentenaire déjà très investi dans le domaine de la création – il a été chef assistant à l'Ensemble Intercontemporain de 2019 à 2021 – que l'équipe de 2e2m vient de choisir comme nouveau directeur artistique. Fringant et charismatique, le chef s'adresse au public pour présenter chacune des œuvres à l'affiche.

Aussi courte que pertinente, Metallages de la compositrice et chanteuse grecque , bien connue aujourd'hui du public parisien, est à l'origine une pièce pour voix. Elle met à l'œuvre l'énergie du souffle – les vents sont joués sans l'embouchure – et la combinatoire rythmique (slaps, boucles, sons bruités de la contrebasse) dans une première partie galvanisante, explorant le registre grave des instruments. Le spectre aigu, dans un second versant très contrasté, renouvelle totalement le paysage sonore. De l'Américain , l'œuvre suivante est victime d'une défaillance technique, un problème avec l'électronique qui ne répond pas. Le titre Dis Un It Im Ir (cinq préfixes signifiant l'empêchement) aura joué en sa défaveur.

Du regretté , Jades réunit cinq instruments dont deux violoncelles qui se font face. L'œuvre est née « de la contemplation d'une toile du peintre chinois Chu Teh Chun », nous dit le compositeur : vision rêveuse, diluée dans un temps sans bord. La musique s'écoule entre caresse et fulgurance, rehaussée des touches colorées de la guitare en quarts de ton de Caroline Delune et peaufinée par les musiciens sous la direction attentive de .

Actif lui aussi sur la scène française, le Suédois Jesper Nordin répond, avec Racines / Rötter donnée en création mondiale, à une commande de l'. Écrite pour grand ensemble, la pièce intègre l'action du « gestrument, », une application qui déclenche, via les Iphone et Ipad des musiciens, une musique venue d'ailleurs. La pièce un rien mystérieuse joue sur l'alternance de séquences instrumentales plutôt musclées et de textures flottantes, écho lointain (parfois à peine perceptible) d'une toute autre réalité sonore. On préfèrera l'univers de la compositrice d'origine turque (vivant à Berlin) Zeynep Gedizlioğlu qui, dans son titre, Jetzt – mit meinen linken Hand (« Maintenant – avec ma main gauche ») interroge le processus de l'écriture. S'élabore au sein de cette pièce presque trop courte un espace de tension entre le monde oriental et la culture occidentale : les sonorités et rythmes de son pays natal – le léger vibrato du saxophone (Pierre-Stéphane Meuger en vedette) évoquant le chant du duduk – sont conjugués avec une écriture d'une autre syntaxe, dans une recherche de synthèse sonore très étonnante : telles ces couleurs ultra-graves et somptueuses du tubax (saxophone contrebasse) où se cristallise le mouvement dans les dernières minutes de l'œuvre. Happés par le geste très expressif de , les musiciens de 2e2m donnent élan et relief à l'une des pièces les plus passionnantes de ce concert.

Crédit photographique : © Sylvie Fréjoux (Léo Margue)

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