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Kissin de grande classe et grandes masses symphoniques à la Philharmonie

Accompagné d'un Philharmonique aux cordes généreuses, met son génie au service du Concerto n° 23 de Mozart, avant que n'offre d'extatiques Offrandes Oubliées de Messiaen et une dense Mer de Debussy.


Soigné cet été pour un problème au bras, passe par Paris non pas avec le 3e Concerto de Rachmaninov d'abord prévu, mais avec un moins dangereux 23e K.488 de Mozart. Parmi les plus sublimes partitions concertantes pour piano, l'ouvrage écrit à la fin du XVIIIe siècle ne sollicite pas autant les muscles des mains et permet au pianiste russe, passée une introduction du thème arrondie à l'orchestre par la vision de , de développer toute sa maestria sans risquer de s'abîmer à nouveau.

Dès son entrée sur le Steinway, Kissin développe une agilité à même de rassurer totalement sur sa santé grâce à un jeu toujours aussi génial, d'une fluidité et d'une légèreté pour lesquelles aurait pu s'accorder un plus souple. Serein, le soliste délivre une superbe clarté à l'Allegro, magnifié par la cadence en fin de mouvement, avant d'aborder avec la même pureté l'un des plus grands mouvements du répertoire, l'Adagio, là encore d'une mélancolie surtout fascinante grâce au doigté du pianiste. La brillance de l'Allegro assai profite du même toucher, bien accompagné par les bois français jusqu'à une coda effusive.

Soigneux et avec toujours sa belle affabilité, Kissin revient devant le public d'une Philharmonie de Paris remplie pour offrir deux bis, à même de définitivement nous tranquilliser quant à ses capacités : d'abord le Rondo alla Turca tiré de la Sonate n°11 K.331 de Mozart, puis la Valse n°14 en mi mineur, op.posth de Chopin, cette dernière passionnante dans la gestion de son thème principale par le pianiste.

L'entracte n'est pas de trop pour redescendre, avant de remonter grâce au Philhar maintenant seul face à son directeur musical (accidenté à la jambe droite, et donc avec atèle et béquille), pour porter dans une ampleur symphonique à présent parfaitement adaptée deux grands ouvrages du répertoire français du XXe siècle.

La veille d'interpréter Oiseaux Exotiques de Messiaen avec Barbara Hannigan, l'orchestre de Radio France présente d'extatiques Offrandes Oubliées. D'une grâce immédiate par la chaleur et la concentration des cordes, l'œuvre d'une douzaine de minutes rappelle quelle culture du compositeur la formation possède depuis le mandat de Myung-Whun Chung, en plus de montrer un appliqué dans la première partie, avant de faire exploser le tutti et par là même occasion sursauter une partie de l'audience au forte, pour revenir à une sonorité superbement contemplative en fin de pièce.

Tout aussi ajustée à Debussy, souvent joué et même enregistré par le chef avec l'ensemble français, l'interprétation se développe en dernière partie vers La Mer, d'une approche très symphonique dès De l'aube à midi sur la mer, là encore exaltée par le volume des cordes. Jeux de vagues ensuite semble si réaliste qu'il donne la nausée à deux personnes dans le public, une au balcon et l'autre au parterre, qui s'effondrent avant d'être portées vers la sortie, quand Dialogue du vent et de la mer procure le même souffle, juste un peu trop chargé dans les derniers instants, cependant toujours d'une vraie puissance orchestrale.

Crédits photographiques : © Chrsitophe Abramowitz / Radio France (répétition) & ResMusica (concert)

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