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La Tempête de Sibelius défendue par des forces danoises sous la baguette de Okko Kamu chez Naxos

La Tempête (1925), musique de scène pour la pièce de Shakespeare, pour solistes, chœur et orchestre, avant-dernière partition majeure de Sibelius avant Tapiola (1926) reçoit une lecture très honorable sous la direction de .

Axel Carpelan, un ami de Sibelius, s'était exprimé avec assurance : « La Tempête est un sujet pour vous ». Le Théâtre royal de Copenhague lui en avait passé commande et la création se déroula dans la capitale danoise le 16 mars 1926 lors d'une soirée exceptionnelle. Plus tard, comme il le fit en d'autres occasions, Sibelius élabora à partir des 34 numéros originaux un brillant triptyque comprenant un Prélude orchestral suivi de deux suites d'orchestre.

En ce qui concerne la musique de scène proposée par Naxos, les textes (chantés en danois) et la musique, reprennent la structure de la première mondiale.

Et si, globalement, la diversité des thèmes et des atmosphères prouvent l'inventivité et l'inspiration du père de Finlandia, ils laissent indéniablement une impression de moindre réussite que les Suites. Cette appréciation ne s'applique pas à l'extraordinaire Ouverture (le Prélude de la suite) décrivant un terrible et violent orage, impressionnant, presque atonal et athématique. L'Orchestre royal danois dirigé par le Finlandais réussit parfaitement ce rendu tellurique, rarement rencontré avec une telle intensité dans l'histoire de la musique. 34 sections, allant de 24 secondes à plus de quatre minutes, dévoilent la variété de la palette sonore et expressive du compositeur, parfaitement défendue par les chanteurs excellents, le chœur homogène et engagé et l'orchestre à l'aise dans ce répertoire stimulant. Ces authentiques qualités parviennent en grande partie à gommer les insuffisances de la prise de son. L'alternance de traits violents (Arrivée d'Arial, n° 3), de sections mélancoliques (Chœur de vents n° 4), menaçantes, dramatiques, ironiques, débonnaires (Chanson de Caliban n° 13), gaies ou dansantes (Interlude de Miranda, n° 14 ; Danses des Naïades, n° 26, ou tout simplement belles (Le chêne pour flûte et cordes en arrière-plan, n° 9), certaines parties chantées retrouvent l'atmosphère de ses chansons avec accompagnement orchestral, tandis que l'on retrouve parfois des mesures se rappelant certaines de ses symphonies (la Cinquième dans L'Arc-en-ciel n° 23), de la suite de Karelia (Interlude de Caliban de la scène, n° 8), mais traitées en mode musique de chambre. Ces exemples choisis dans cette fresque captivante témoignent de la richesse inventive du compositeur quinquagénaire qui excelle en plus dans les pastiches et l'illustration de la magie.

Il est juste de redire les qualités de ce spectacle enregistré, hautement maîtrisé et magnifié par les intervenants de premier ordre plongés dans les univers mêlés de Shakespeare et de Sibelius.

D'autres enregistrements antérieurs ont placé la barre très haut et la confrontation se révèle très disputée. Cela revient à reconnaître une légère supériorité aux versions superlatives dirigées par avec l'Orchestre symphonique de la Radio finlandaise (Ondine, 1992) et par avec l'Orchestre symphonique de Lahti (BIS, 1992, en finnois). Sans oublier l'ouverture et les deux suites, plus connues, exceptionnellement réussies sous les baguettes de Neeme Järvi avec l'Orchestre symphonique de Göteborg (BIS, 1989) et de avec l'Orchestre symphonique de Lahti (BIS, 2011). Ces interprétations bénéficient d'une qualité sonore sensiblement supérieure à la présente gravure de Okko Kamu qui a sans doute le handicap d'une captation en public ce qui n'ôte en rien les qualités indéniables de sa lecture enthousiaste et loyale.

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