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Le Couronnement de Poppée par Emiliano Gonzalez Toro, satire inaboutie

Avec une distribution efficace, c'est l'absence de direction d'ensemble qui plombe le dernier volet du cycle monteverdien, donné en version de concert par l'ensemble et .

clôt son cycle Monteverdi à l'Arsenal, après Orfeo et un Retour d'Ulysse de belle tenue. Cette fois, il ne se réserve que quelques petits rôles, laissant le devant de la scène à (Néron) et (Poppée) : le premier est à la peine et doit souvent forcer sa voix pour tenter de trouver la folie du personnage, au détriment de la musicalité ; la seconde est beaucoup plus solide, mais le contexte de cette version de concert ne favorise pas la complexité du personnage.

Ce qui manque ici, c'est d'abord une direction, un sens de la satire et un travail de caractérisation des personnages – il faut l'expérience d'Anders Dahlin et de dans les deux rôles de nourrice pour réussir à donner assez de relief à leurs personnages ; le comique est à vrai dire mieux traité que la tragédie, notamment avec toute une série de petits rôles bien rendus par Lauranne Oliva, Natalie Pérez et Mathilde Étienne. L'Octavie d' reste ainsi à la lisière de la grandeur tragique de son personnage parce que le travail rhétorique sur le texte ne lui permet pas d'en tirer toute l'émotion. L'effectif limité de l'ensemble instrumental (une douzaine de musiciens) sonne souvent un peu pauvre dans la grande salle de l'Arsenal, ce qui ne favorise pas l'animation du continuo, essentiel dans ce répertoire. Et puis il y a de vrais contresens : on pourrait discuter du tempo (trop) rapide du monologue initial d'Ottone, qui ne favorise pas la poésie (et a une voix un peu acide qui n'est pas à l'avantage du personnage) ; le choix de Gonzalez Toro de faire tourner à la farce le court air (Mori e mori felice) de l'affranchi (qu'il chante lui-même) qui annonce à Sénèque (sonore ) sa condamnation est beaucoup plus gênant, parce qu'il rompt la logique de la scène qui oppose ce modeste messager qui a compris la philosophie stoïcienne et les disciples de Sénèque qui, eux, la renient au premier vent contraire.

Le théâtre était bien présent avec la même équipe pour décrire les malheurs d'Ulysse, mais Le Couronnement demande un tout autre théâtre, et la satire semble ici plus difficile que la tragédie.

Crédit photographique : © Michel Novak

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