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Féérique Cendrillon de Massenet à l’Opéra de Limoges

Pour accompagner cette reprise de la très belle et astucieuse production d', l'Opéra de Limoges offre une distribution époustouflante, redonnant à la trop rare Cendrillon de Massenet, ses couleurs et sa féérie.

Œuvre singulière par son esprit, sa variété d'inspiration et sa fausse légèreté, Cendrillon n'est pas l'œuvre la plus représentée de Massenet. L'Opéra de Limoges donne des regrets face à cette injustice en proposant au public la reprise de la mise en scène d'Ezio Toffolutti qui offre non seulement la féérie indispensable aux scènes de la marraine la bonne fée (quels éclairages et atmosphères !), véritable cheffe d'orchestre de l'histoire mais aussi la poésie et la profondeur nécessaire pour nous conter l'union de deux solitudes, celle d'un prince (sur un piédestal) et de sa délicieuse souillon (dans l'âtre de la cheminée). Le tout rehaussé de costumes signifiants, drôles et somptueux et agrémenté de chorégraphies évocatrices des ridicules vanités du monde. Splendide, jamais gratuit, c'est un beau voyage au pays bleu où « chacun a fait de son mieux » pour enchanter le public le temps d'une évasion salvatrice.

Magiques sont également les voix proposées ce soir dans une homogénéité parfaite. offre un chant d'une suprême élégance, délicat, fragile dans les moments interrogatifs mais aussi puissant dans sa projection dans les passages plus dramatiques. Homogène sur l'ensemble de la tessiture, ce soprano est une merveille dans le chant français, où l'émission, la prosodie et la clarté sont si importants. Face à elle, on trouve un prince aussi dépressif que bouillonnant. La mezzo impressionne dès sa première intervention par un sens du tragique très poussé, une émission franche et égale, un timbre charnu et onctueux d'une très grande beauté. Le duo de l'acte III où ces deux voix fusionnent est un sommet du genre, incandescent et bouleversant.

Que dire de l'inénarrable Mme de la Haltière de si ce n'est qu'elle nous emmène aussi loin dans le ridicule que dans la noirceur du personnage que son splendide mezzo peut procurer. Rien ne lui échappe des mots, de la prosodie redoutable attribuée au rôle et qu'elle assume crânement entourée de ces deux pestes de filles ( et ) qui sont au diapason du comique et de la technique.

Très scrupuleux sur la prononciation, le Pandolphe impeccable de style et de tenue du baryton touche par la sincérité de son chant et par sa verve comique tandis que la magnifique et pétillante fée de éblouit par ses aigus légers et aériens magnifiquement entourée par ses esprits.

Si le chœur impressionne une fois encore, c'est l'orchestre de l'Opéra de Limoges qui subjugue ce soir par les couleurs qu'il délivre, l'onctuosité du son et des lignes, sa scintillance et sa clarté particulièrement travaillée par qui soigne les transitions de styles et d'atmosphère (lyrique, féériques, naturalistes, comiques) et qui souligne les charmes incontestables de cette partition aux sublimes moirures debussystes.

Crédit photographique : © Steve Barek

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