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Crystal Palace : l’Orchestre Victor Hugo s’exile à Guernesey

Regroupant quatre œuvres de , Crystal Palace propose une immersion dans le style dépaysant du jeune compositeur français.

Ce siècle avait 61 ans et déjà Crystal Palace perçait dans Hauteville House, la maison de Guernesey où Hugo avait trouvé refuge en 1856 dans la foulée du coup d'état de Napoléon III. Il s'agissait, sous le toit du troisième étage, d'une verrière appelée Chambre de verre, Belvédère, ou encore Look out. De ce nid d'aigle le grand auteur français pouvait bénéficier d'une vue imprenable sur la ville de Saint-Pierre-Port, sur l'immensité marine, et au-delà sur la France qu'il avait dû fuir. Avec ses étés étouffants et ses hivers glacials, cette aïeule de la « passoire thermique » ne contraria en rien la naissance de La Légende des siècles, des Misérables, de L'Homme qui rit et de bien d'autres chefs-d'oeuvre couchés par la plume de celui qui avait vu le jour à Besançon en 1802. C'est à Besançon aussi qu'est né en 2010, et d'abord baptisé sous l'impulsion de , l'Orchestre Victor Hugo. Et c'est aujourd'hui la musique de (de style « mer en mouvement », dixit Frédéric Lodéon, maestro de la création du Transatlantique de ce dernier en 2014) qui impulsa, via l'intitulé de ce disque riche en atmosphères, l'idée d'une rencontre au sommet à Guernesey.

, né en 1974, prix du public du Concours International Jeunes Compositeurs de Boulogne en 2006, puis Prix Claude Arrieu de la SACEM en 2016, a suivi les enseignements de Guillaume Connesson et cela s'entend. On retrouve chez Lefrançois la luxuriance orchestrale consonante, prisée par une nouvelle génération d'artistes (de Tanguy à Pépin) affranchis de tout diktat, à laquelle ne manque encore que la reconquête d'un nouvel Everest mélodique pour infiltrer durablement la mémoire de l'auditeur. Dans cet espoir, les quatre œuvres enregistrées sur Crystal Palace restent de formidables machines pour orchestre. Quasiment enchaînées, elles sont un bonheur pour l'oreille. Plus encore qu'au Concerto pour clarinette (24 mn), qu'à Siguirya pour flûte et orchestre à cordes (7 mn), qu'au Concertino pour petite clarinette et orchestre à cordes (13 mn), on succombé au charme fou de Le nouveau Balnéaire, une évocation de dix minutes d'un voyage en train vers Le Havre, en compagnie d'Honegger et de Dutilleux. Le Victor Hugo, dans ce poème symphonique qui semble avoir été composé pour lui, atteint des sommets de raffinement sous la baguette de . Verdier, bien que lui-même clarinettiste super-soliste à l'Opéra de Paris, confie les concertos à de luxueux confrères : et trouvent là abondante matière à exhiber leur sonorité respective, et aussi leur virtuosité, notamment au moment des conséquentes cadences prévues par Lefrançois. La flûte acidulée de pimente avec loquacité le virevoltant Siguirya. En compagnie de tels artistes, voilà un exil à Guernesey hautement recommandable.

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