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Une Périchole vive et naturelle par Emmanuel Gardeil et ses Chants de Garonne

En marge des scènes parisiennes (Opéra Comique, Théâtre des Champs-Elysées) où l'ouvrage d'Offenbach a été donné récemment, et ses , reprennent avec grand plaisir cet opéra bouffe quelque peu déjanté.

Vingt ans après une première production triomphale sous les cloîtres de Condom au festival des Nuits Musicales en Armagnac, la deuxième génération de la troupe des se plaît à reprendre une Périchole peut-être un peu plus sage. Son directeur artistique , qui signe la mise en scène, connaît bien l'œuvre, ayant lui-même interprété le vice-roi. Il s'agit certes d'une fantaisie, mais Offenbach et ses librettistes n'ont pu s'empêcher de parsemer les dialogues d'allusions quelque peu subversives à l'égard du régime de Napoléon III, notamment dans le premier tableau de la fête du vice-roi.

L'action est transposée du Pérou dans un Far West tout aussi imaginaire et fantaisiste, où la guinguette des trois cousines devient un saloon dans lequel elles dansent, Piquillo et Périchole sont de miséreux indiens, le courtisan Don Pedro de Hinoyosa présente la face crayeuse d'un croque-mort à la Lucky Luke, le vieux prisonnier s'est métamorphosé en quatre jeunes Dalton et le vice-roi est naturellement le shérif despotique de l'endroit. Le mariage de complaisance entre la nouvelle maîtresse du vice-roi et le pauvre hère de passage, en fait Piquillo, parodie jusque dans le plus mauvais goût d'une débauche de couleur flashy, avec faux Elvis, les mariages fantoches, qui se pratiquent à la chaîne à Las Vegas. Les dialogues ont été actualisés et totalement réécrits pour le public d'aujourd'hui afin d'assurer un meilleur effet comique. Cela n'empêche nullement un total respect de l'ouvrage où les personnages de la cour sont hypocrites et veules à souhait. Les protagonistes évoluent dans un décor minimaliste de structures légères, selon une mise en scène sobre, rythmée et efficace qui se concentre sur le chant et le jeu d'acteurs.


La Périchole de , faussement naïve, se montre volontaire et habile, menant pas le bout du nez le don juanesque vice-roi, ainsi que son compagnon Piquillo, auquel elle demeure attachée. Son air de la lettre est touchant, celui de la griserie burlesque et son « Mon Dieu que les hommes sont bêtes », bien senti. Paul Cremazy incarne parfaitement le rôle de composition de Piquillo, cet amoureux transi, bien benêt et sans talent. Son chant par contre ne manque pas de talent avec un air de la prison poignant « Ma femme, ma femme, qu'est-ce qu'elle fait donc pendant c'temps-là ? » et une belle présence scénique.

Le rôle majeur est bien entendu celui du vice-roi, petit tyran d'opérette, que interprète avec un plaisir gourmand. Il mène le jeu en s'amusant de la perversité de son personnage. Les trois cousines interprétées par , Paola Cossi et sont à la fois enjouées et empathiques, tandis que les courtisanes s'avèrent hautaines et snob comme il convient. et campent des courtisans obséquieux, serviles et veules totalement hilarants. Accompagnant le spectacle au piano avec le rythme et le talent qu'on lui connaît, s'amuse autant que l'ensemble de la troupe.

Cette production vivifiante et joyeuse devrait être reprise cet été à Lectoure pour le 55e festival des Nuits Musicales en Armagnac.

Crédit photographiques : © Paul Fave

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