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Dimitri Chostakovitch, symphonie en rouge : documentaire pour un cinquantenaire

A l'occasion du cinquantenaire de la disparition du compositeur emblématique de l'ère soviétique, Arte diffuse un nouveau documentaire « , symphonie en rouge », ce dimanche 14 septembre à 17h30, et en replay.

Réalisé en France par le duo de documentaristes Philippe Picard
et Jérôme Lambert dont il s'agit du premier documentaire musical au sein d'une longue carrière où les sujets de la création, de la politique et de l'histoire abondent (« Charlie, envers et contre tout » et « Félix Vallotton, les couleurs du désir » en 2025), produit par Un film à la patte, maison de production entièrement féminine et basée dans la très européenne Strasbourg, le film retrace la vie du compositeur en l'inscrivant dans le contexte politique de l'époque, dans une troublante résonnance avec le retour de la confrontation géopolitique des blocs de l'Ouest et de l'Est.

En 56 courtes minutes, le film retrace avec rythme et un dramatisme approprié les principales étapes de la vie du compositeur à partir d'images d'archives – filmées notamment – rares et des commentaires pertinents de musiciens proches du cercle du compositeur. En cette période complexe, les commentaires des musiciens s'inscrivent prudemment dans les seules dimensions artistique et historique, sans lien marqué avec l'actualité. Le chef se taille la part du lion , avec une malice qui s'inscrit bien dans l'humour chostakovien, tandis que multiplie les formules qui font mouche, non sans une certaine emphase. L'originalité du documentaire est à trouver dans la mise en exergue de la présence précoce du tragique dans la vie du compositeur et ce dès la rare Suite pour deux pianos de l'opus 6 (1922), avec les lumineuses interventions de , en duo avec , et de la résistance intérieure avec Raïok, cantate composée « pour le tiroir » par Chostakovitch après sa condamnation pour formalisme par Jdanov, et qui ne fut créée qu'en 1989 par le dissident Mstislav Rostropovitch, dix mois avant la chute du Mur de Berlin.

Le documentaire est juste, dense sans être touffu et riche en émotions musicales, et restera comme une photographie de la place importante qu'a acquis Chostakovitch en Europe occidentale cinquante ans après sa mort. La seule omission vraiment regrettable concerne le courage phénoménal de Chostakovitch à l'endroit du peuple juif avec son cycle De la poésie populaire juive et surtout la Symphonie n°13 Babi Yar. La capacité de cet artiste à résister moralement et ouvertement au pouvoir politique de son pays pour défendre l'humanité de ceux qui  sont stigmatisés, déportés et massacrés est pourtant l'aspect politique le plus impressionnant et peut-être le plus inspirant actuellement de Chostakovitch.

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