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Cappricio vu par Robert Carsen avec Renée Fleming à Garnier

Dernière nouvelle production de la saison, Capriccio, conversation en musique de sur un livret du compositeur et de Clemens Kraus, vient de s'achever au Palais Garnier dans une production spectaculaire signée avec une distribution digne d'un festival international.

En ressort-on certain cependant d'avoir vu l'œuvre dans son esprit intime et avec des interprètes bien distribués dans leurs rôles ? Cela n'est pas sûr. a situé sa mise en scène, un magnifique travail théâtral, à l'époque de la création (1942) c'est à dire pendant l'Occupation comme l'attestent les costumes et la présence bien inutile d'un soldat allemand en grand uniforme de la Wehrmacht. Cela fonctionne, même si l'on peut trouver bizarre cette longue conversation sur des sujets esthétiques du XVIIIème siècle. On reprochera d'avantage au metteur en scène d'avoir éclaté cette conversation dans l'immensité du plateau dénudé du Palais Garnier. Ce qui donne certes l'occasion de voir le Foyer de la Danse et de jouer très habilement avec des perspectives et des miroirs, mais disperse complètement l'action. C'est extrapoler un peu rapidement sur une composante pirandelienne de l'œuvre qui ne comporte rien dans son livret qui indique qu'il s'agisse de théâtre dans le théâtre. Tout juste une digression sur un point fondamental d'esthétique de l'histoire de l'opéra, écrite et composée par un vieux compositeur à la fin de sa carrière et témoin de la disparition inexorable d'une civilisation dans un accès de folie des hommes.

L'œuvre aurait dû être dirigée par Christian Thielemann. qui l'a remplacé n'a pas réussi à trouver le fragile équilibre entre scène et fosse, ni même à régler les plans sonores au sein d'un orchestre pourtant magnifique dans ses individualités comme le sextuor de cordes qui ouvre l'opéra sur scène, et non en coulisse comme l'indique le livret. La distribution réunie, on le répète, était d'un niveau international. Avec des inégalités cependant. Si est un Flamand exemplaire de ton et de diction, il aurait gagné à être entendu dans un espace plus restreint ou dans une mise en scène plus resserrée. Le Comte de a belle allure et aussi une diction merveilleuse, ce qui n'est pas le cas du canadien (Olivier). Anne-Sofie von Otter avec sa grande présence scénique campe une Clairon excellente, le directeur La Roche fait illusion jusqu'à son grand monologue où il est un peu court de souffle, mais quel comédien que ce  ! Les seconds rôles sont soignés et même superlatifs : Robert Tear pour la très courte apparition du souffleur Monsieur Taupe, Petri Lindroos pour le Maître d'Hôtel qui n'a que quelques phrases à dire et le couple de chanteurs italiens, Annamaria Dell'Oste et Bary Banks, est désopilant. Reste le personnage principal, la Comtesse Madeleine incarnée par l'Américaine . Qu'il nous soit permit de ne pas partager l'engouement général pour cette chanteuse aux qualités vocales indéniables : timbre magnifique, ligne d'une grande souplesse, aigus radieux comme les réclament les grands rôles de sopranos straussiens. Sa silhouette est magnifique, elle porte avec beaucoup d'élégance et même de glamour les deux sublimes robes de haute couture crées pour elle par Anthony Powell. Sa diction n'est pas exemplaire mais très acceptable. Carsen lui a réservé une scène finale, qui est le morceau de bravoure de l'œuvre, presque indécente dans le non-respect de l'intimité de boudoir qui est son essence voulue par compositeur et librettiste. Son visage et son jeu ne reflètent simplement pas la grande spiritualité et le raffinement intellectuel de ce personnage hors du temps. C'est peut être peu au regard des concepteurs de ce type de spectacles faits pour en mettre plein la vue. C'est pourtant là que réside l'essentiel et une fois de plus sera passé à côté.

Crédit photographique : © Salzburger Festspiele Pressebüro

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