- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Les Noces aixoises triomphent au Grand Théâtre

Heureux Luxembourgeois qui ont pu applaudir la sobriété de la belle mise en scène des Noces de Figaro proposée l'été dernier au Festival d'Aix-en-Provence.

Optant pour le refus de l'accessoire, ici réduit au strict minimum (un matelas à même le sol, un unique fauteuil à l'acte I…), prend le parti de concentrer sa mise en scène sur l'expérience émotionnelle traversée, dans la plus grande nudité, par les différents personnages du drame. Les acteurs évoluent ainsi dans un élégant décor blanc duquel se détachent les costumes de , ainsi que les superbes éclairages d'Alain Poisson qui marquent une à une les étapes du déroulement temporel de la «folle journée» : pièce borgne à l'acte I, soleil écrasant au II, fin d'après-midi au III, lumière lunaire et début d'aurore à l'acte IV. Dans un tel environnement, davantage caractérisé par la pure beauté plastique que par la profusion et l'encombrement de l'accessoire, tout élément visuel acquiert une valeur et une fonction particulières, comme le montre par exemple l'utilisation qui est faite des bottes ou chaussures des uns et des autres, de simples objets qui deviennent tour à tour signes de pouvoir, de soumission ou de séduction. Sur le fond du décor, une série d'ouvertures centrales et latérales semble suggérer tous les possibles d'une journée où chacun, à un moment donné, s'égare dans le vertige de ses désirs reconnus ou inavoués. Une mise en scène minimaliste, donc, dans laquelle chaque geste se voit investi d'un sens particulier, et qui rend particulièrement compréhensible du public les nombreux rebondissements d'une action foisonnante.

Le plateau est dans l'ensemble extrêmement convaincant, à commencer par le très beau couple aristocratique que forment le jeune Américain Daniel Teadt, un baryton qui fera certainement parler de lui, et l'Ukrainienne , cantatrice bien connue du public des «baroqueux» ; sa voix naturellement pure et cristalline, qui a pris quelque ampleur ces dernières années (c'est la Donna Anna de René Jacobs dans le récent enregistrement de Don Giovanni), fait merveille dans le rôle de la comtesse. Si la Susanna de est un pur enchantement, sur le plan scénique comme sur le plan vocal, le Figaro prometteur de gagnera encore à mûrir musicalement. Bonnes prestations également de la part de Katij Dragojevic, séduisant Chérubin, et surtout de Marie McLaughlin, superbe Marcelline pour une fois dotée de son air de l'acte IV «il capro e la capretta».

Le grand triomphateur de la soirée restera vraisemblablement le en très grande forme, galvanisé par la baguette énergique d'. Certains pourront trouver excessive la rapidité des tempi choisis par le chef («sull'aria» est mené tambour battant…), mais on aura rarement entendu une telle transparence dans la superposition des timbres. Le volume sonore relativement réduit produit par ces instruments d'époque permet aux voix de s'épanouir en toute liberté, et sans forcer, montrant une fois de plus à quel point la musique «ancienne» est davantage affaire de dynamique que de volume sonore.

Crédit photographique : © Festival d'Aix-en-Provence

(Visited 558 times, 1 visits today)