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Roméo et Juliette de Dusapin : révolution quand tu nous tiens

2008 l'année Dusapin : après Medea en mars à Gennevilliers, avant la création de Passion en juillet à Aix-en-Provence, éclatante reprise de Roméo et Juliette à l'Opéra-comique, premier opus lyrique du compositeur.

Commande de l'Opéra de Montpellier, créé dans le Festival de cette même ville en 1989 pour les célébrations liées au bicentenaire de la Révolution française, Roméo et Juliette relègue au loin la célèbre histoire d'amour pour se concentrer sur le rapport des personnages principaux envers le carcan de leur condition sociale. Juliette entraîne Roméo dans le tourment révolutionnaire, les protagonistes se dédoublent et sont guidés par Bill, rôle parlé qui renvoie à William Shakespeare, celui qui a porté au niveau de mythe moderne les amants de Vérone.

use et abuse du symbole dans sa mise en scène : les habits de Roméo et Juliette 1 rappellent 68 (jean moulant pour lui, robe très courte pour elle, subtil mélange d'Italie du XVIe et de la France des années 60 signé ), une petite plate-forme centrale et un rideau de branches de saule pleureur font figure de balcon, Bill avec son complet-veston et ses lunettes à grosses montures a des airs de Michel Foucault (illustre prédécesseur de Dusapin au Collège de France), le chœur porte foulards et couvre-chefs d'une rouge révolutionnaire et le quatuor vocal, maître es-révolution dans le livret d', revêt des atours amérindiens très « post 68 » dans la seconde partie.

Les chanteurs sont ici de véritables comédiens : l'alternance parlé (avec une légère sonorisation) / chanté se fait avec naturel (Roméo et Juliette 2 parlent et ne se mettent à chanter qu'au moment ou eux-mêmes deviennent révolutionnaires), rien n'est laissé au hasard sur scène, la performance physique (déplacements, chutes, mouvements dansés) est époustouflante. Musicalement la fête est aussi présente. L' sert avec précision la riche partition pleine de références de sous la direction attentive d'. Chacun des protagonistes, des solistes au chœur en passant par le quatuor vocal, n'appelle que des éloges, avec une mention spéciale pour , Karen Vourc'h et le clarinettiste , qui parcours la scène avec ses diverses clarinettes (de la petite en mi bémol à la contrebasse).

Une production qui, espérons le, fera date, et bénéficiera de diverses reprises. L'Opéra-comique a pleinement démontré qu'un opéra écrit il y a vingt ans pouvait être traité comme une pièce du répertoire.

Crédit photographique : (Roméo 1) & Karen Vourc'h (Juliette 1) (c) Elisabeth Carecchio

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