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Ariane et Barbe-Bleue de Dukas, les cinq filles d’Orlamonde ont trouvé les portes

Olivier Messiaen parlait, à propos de l'unique opéra de son maître , de «chef d'œuvre incompris». Force est de constater que l'ouvrage demeure une rareté, malgré une production à l'Opéra en 2007 et deux enregistrements récents (dirigés par Bertrand de Billy et par Leon Botstein).

On salue donc la programmation de l'Orchestre Philharmonique de Radio-France, qui avait déjà assuré le premier enregistrement de l'œuvre avec Armin Jordan. C'est au tour du jeune de dérouler les sortilèges de la partition. Il dompte avec énergie les masses chorales et orchestrales qui se déchaînent dans le premier tableau, puis maintient la tension jusqu'à la scène finale, qui prend son temps mais ne semble pas statique. L'ouverture successive des portes est unifiée par un seul dessein dramatique, elle révèle aussi la limite de la conception du chef : il n'encourage pas réellement un orchestre irréprochable, mais au son plutôt massif, à exploiter les miroitements de timbres de la partition. «L'aveuglante nappe de clarté» et «le silence ébloui» que Maeterlinck imagine pour l'échappée des femmes vers la plage, au second acte, auraient pu être plus sensibles, par exemple.

ménage heureusement les voix, qui doivent lutter contre une orchestration souvent dense. Le timbre de , un mezzo plutôt clair, convient à la tessiture ambiguë d'Ariane. La diction nette, la fermeté du chant servent bien la détermination du personnage, qui existe, mais, hélas, ne rayonne pas. Dans le rôle difficile de la Nourrice, moins aisément l'orchestre, bien que sa caractérisation inquiète soit réussie. Parmi les seconds rôles, tous excellemment tenus, on remarque surtout (qu'on a pu voir dans Kátia Kabanová à l'Opéra de Paris) et la Mélisande délicate d', tandis que parvient à impressionner dans les quelques phrases du rôle de Barbe-Bleue. A la fin du conte, lorsqu'Ariane laisse les épouses retourner auprès de leur seigneur, on brûle de lui demander, comme Sélysette, «Quand reviens-tu ?»

Crédit photographique : © Robert Walker

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