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A Munich, le triomphe d’Eri Nakamura

Nous ne voulions pas être Giulietta ce soir-ci. De centaines de mélomanes s'étaient rendus à Munich pour écouter Anna Netrebko dans I Capuleti e i Montecchi. Mais la diva russe, souffrante, dut annuler les deux dernières représentations d'une série dont elle avait, pourtant, assuré les trois premières. Ce fut qui sauta dans la brèche, jeune soprano japonaise, en troupe au Bayerische Staatsoper depuis 2010.

Si elle avait assuré la première de cette production en 2011, sa renommée internationale est encore limitée. Comment le public allait-il réagir à ce jeune talent ?

Et bien, ce fut un triomphe – un triomphe, en plus, amplement mérité. Doté d'un soprano lyrique d'une grande beauté, techniquement sans failles, riches en harmoniques et en couleurs, Nakamura nous gratifie d'un chant gorgé d'émotions. Fragile, psychiquement en danger dès le début, cette Juliette souffre autant de son amour interdit pour Roméo qu'elle en a besoin. Ainsi, si elle manque un peu de puissance au finale de l'acte I, cela semble presque voulu, tellement cette jeune fille paraît vouée à la mort dès son air d'entrée. A ses côtés, Vesselina Kassarova campe un Roméo surprenant. Incertain, souffrant, lui aussi, d'un amour impossible, ce Roméo n'a rien d'un guerrier. Et pourtant, il nous semble que Kasarova fait de nécessité vertu. Luttant, à maintes reprises, contre une tessiture désormais trop haute pour elle, criant ses aigus plus de les chanter (laborieuse « Tremenda ultrice spada »), ce n'est qu'aux moments intimes qu'elle réussit à nous convaincre. Les duos des amoureux, où les voix des deux chanteuses se marient à merveille, deviennent ainsi les grands moments magiques de la soirée.

Les hommes passent au second plan dans cet opéra. C'est dommage pour Ante Jerkunica et Paul Gay qui auraient mérités, tous deux, des emplois plus importants. Dimitri Pittas, en revanche, ténor à l'émission étroite et aux aigus poussifs, ne nous fait regretter à aucun moment la brièveté de son rôle.

Au pupitre d'un brillant, notamment, dans les interventions solistes (cor, harpe, clarinette), s'avère un chef belcantiste de premier ordre. Phrasant soigneusement avec les chanteurs, il déploie, en même temps, l'énergie nécessaire pour les cabalettes et finales.

Et la mise en scène ? Ce n'est pas par hasard que nous en parlons en dernier. Construite autour des costumes excentriques de , elle manque, par ailleurs, de toute originalité. Stylisée au maximum (pas d'épée, point de fiole pour le poison), une direction d'acteur, somme toute, correcte, sauve la mise. Ou est-ce le talent scénique d' (et, un cran en dessous, de ) qui sauve le metteur en scène ?

Crédit photographique : (Giulietta) © Wilfried Hösl

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