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Les exilés de Hitler au paradis

Peter Rosen est un réalisateur et un producteur prolifique sur la musique classique depuis les années 1970. Avec « Les ombres au paradis, les exilés de Hitler à Hollywood», documentaire au titre quelque peu racoleur mais cohérent par rapport à son thème, il traite d'un sujet aussi connu que rarement traité à l'image, à savoir l'émigration à partir de 1933 d'une partie essentielle de l'élite musicale et intellectuelle allemande vers les Etats-Unis sous le coup des lois raciales et antisémites du régime nazi. Alors que les architectes allèrent à Chicago et les artistes à New-York, écrivains et musiciens se retrouvèrent dans le sud de la Californie autour de Hollywood.

On ne criera pas au chef d'œuvre pour ce documentaire, entre les interventions pataudes de et les interprétations de l' qui coupent l'élan narratif plus qu'elles ne contribuent à souligner la qualité musicale de ces artistes exilés. Quand à l'insistance  à souligner la beauté du climat estival californien pendant que l'Europe était dans la nuit et le brouillard, elle est appuyée par des images étonnantes de la Californie des années 40 en couleur, mais répétée à l'excès.

Heureusement le message essentiel est délivré avec pertinence et efficacité. Les images rares des compositeurs en exil, la description de leurs doutes, de leurs difficultés matérielles et morales, de la rudesse de la politique américaine à l'égard des immigrants, le repli sur elle-même de cette communauté allemande dont tous ses représentants ne parlaient pas bien anglais, le sacrifice de grandes ambitions artistiques (Schoenberg qui n'était plus joué, ou ravalés au rang de compositeurs de musique de films), l'utilisation ambiguë par Thomas Mann de la musique dodécaphonique de Schoenberg pour son Docteur Faustus écrit de 1943 à 1947 sur le thème de l'Allemagne des années 30, le départ ignominieux de lors de la chasse anti-communiste de l'après-guerre, le retour finalement impossible à la mère patrie après les transformations imposées par la guerre, tous ces renoncements et cette souffrance justifient le titre du documentaire. Arrachés à leur patrie, sauvés par l'Amérique , ces compositeurs le furent au prix de n'être que l'ombre d'eux-mêmes.

Pour l'anecdote, on voit fugitivement apparaître sans que son nom apparaisse à l'écran. Il était pourtant bien exilé à Hollywood chassé par Hitler, mais non Allemand car Polonais naturalisé Français en 1938, il ne cadrait apparemment pas dans le thème de ce documentaire.

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