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Paris : La Belle au Bois Dormant en grande forme

Pour Rudolph Noureev, La Belle au bois dormant constituait le « ballet des ballets ».

Il en créa sa propre version en 1989 pour le ballet de l'Opéra de Paris : « Avec La Belle au bois dormant, j'ai fait un essai non dans la création mais dans la reconstitution chorégraphique. Car je suis resté fidèle au texte originel. Seulement, il m'a fallu l'adapter aux circonstances : nombre et virtuosité des interprètes à ma disposition. L'essentiel est de ne jamais rien changer de fondamental à un ballet de ce type, composé exactement avec le goût d'un menu français : entrée, plat de résistance, sucreries. Il ne faut pas bousculer cette ordonnance. »

L'opulence de la production contribue à exalter la féérie du conte de Charles Perrault. La création des costumes fut, à l'époque, confiée à Nicholas Georgiadis ( a aujourd'hui repris le flambeau), qui expliquera ainsi ses intentions : « J'ai essayé, pour cette nouvelle présentation à l'Opéra, d'opérer un syncrétisme entre des époques : la cour de Jacques Ier d'Angleterre pour le prologue, le XVIIe siècle pour l'acte I, le XVIIIe siècle pour l'acte II, et un mélange de costumes empruntés aux fêtes de la cour des rois de France pour le dernier acte. »

Ce conte français est accompagné par une musique russe : c'est Tchaïkovski qui en signa la partition : « Le sujet est si poétique, si favorable à l'inspiration musicale que j'ai été captivé par lui […]  J'ai travaillé à l'instrumentation avec beaucoup d'amour et d'attention et j'ai inventé plusieurs combinaisons orchestrales totalement nouvelles, dont j'espère qu'elles seront belles et intéressantes. » On confirme.

Et les danseurs dans tout cela ? Toute la troupe se révèle excellente dans cet exercice de haute voltige.

campe une superbe Aurore. Certes, sa technique est parfois hésitante (son adage à la rose ne restera pas dans les annales de la Danse…), mais sa beauté, sa blondeur et son port de reine servent son personnage. Et puis il y a ce sourire : on n'a jamais fait plus radieux. interprète son Prince Désiré, celui qui, par un baiser d'amour, va réveiller la belle endormie. Si le jeune homme possède indéniablement le physique du rôle, il possède surtout une très belle technique et une solide assurance en scène. Curieusement, leur partenariat ne nous convainc qu'à moitié. La sauce ne prend pas ; il manque une certaine osmose, une certaine complicité, pour que l'on croit vraiment à leur histoire d'amour.

, en Fée Carabosse, exprime de manière très lisible la nature malfaisante de son personnage.

, enfin, est exceptionnel dans le rôle de l'Oiseau bleu. Ce garçon est un magicien : on n'en dira pas plus. Son partenariat avec l'exquise est une réussite.

Les ensembles sont précis et parfaitement calibrés : cela faisait longtemps que l'on n'avait pas vu le corps de ballet dans une forme aussi resplendissante. Les Fées méritent tout particulièrement d'être saluées. est craquante en Fée Canari et apporte sa luminosité et son moelleux à la Fée Bleue. Et surtout, il y , spectaculaire dans le rôle de la Fée Violente. Et pourtant, sa variation est réputée difficile, avec ses pas courus et des positions de bras sèches et nerveuses. Cette danseuse élégante et pétillante mériterait qu'on lui fasse davantage confiance.

La princesse épousa le prince ; ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants. Tout est bien qui finit bien. Les grilles du palais se referment sur eux, comme les pages du livre se referment sur le conte de Perrault. C'était une soirée à l'Opéra Bastille un 7 décembre.

Crédits photographiques : ; © Sébastien Mathé / Opéra national de Paris

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