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Vanessa Benelli Mosell s’illustre dans Rachmaninov

La pianiste italienne s'était illustrée dans Stockhausen lors de ses précédents enregistrements (lire notre entretien). Pour son troisième album chez Decca, elle propose un programme enthousiasmant qui ne fait que confirmer sa présence au plus haut niveau musical.

Œuvre phare du compositeur mais aussi du répertoire post- romantique russe, le Concerto n° 2 se distingue ici par sa lecture « classique ». Son esthétique peut sembler lisse et attendue pourtant cette version éclaire avec verve la beauté harmonique et polyphonique de ces pages. Dirigé par , le suit les intentions de la soliste dans une tendre étreinte charnelle dont les accents passionnés nous touchent. Tour à tour délicate puis persuasive quand le propos s'anime, la pianiste trouve avec sobriété un équilibre digital aux moyens techniques de premier plan. Les sonorités sont pleines et finement nuancées. Davantage de corps côté orchestre, dans l'Andante et surtout le Final ainsi que des tempi plus enlevés auraient permis à cette version de se placer aux côtés des références du genre.

La seule déception vient de la prise de son et du montage final. Dans l'Andante, le piano est placé en avant ce qui a pour effet de nous priver des nuances de dynamiques. Dans l'Allegro, juste après la deuxième annotation Meno Mosso, le montage laisse clairement entendre un volume sonore baissé qui coupe de manière abrupte le crescendo. Même chose à nouveau dans l'Allegro au tout début du climax final introduit par le piano. Plus loin, c'est une page tournée qu'on entend clairement. Cela reste surprenant pour un disque de ce niveau.

Peu enregistrées, les Variations sur un thème de Corelli constituent un complément de choix. Ce cycle illustre à quel point l'écriture de Rachmaninov est complexe. D'apparence spartiate et grave, ces Variations sont représentatives de la profondeur son langage, de sa capacité à créer en quelques mesures des atmosphères, des états d'âme qui transportent notre imaginaire. Le jeu de la pianiste fait pleinement sien cet aspect-là et nous fait pénétrer au cœur de la multitude de détails dont recèle la partition. Noblesse et grandeur caractérisent ainsi les deux dernières variations, précédant une Coda dont la modernité reste frappante. Le tempo retenu de la 4e, ses réminiscences nostalgiques étirent le temps dans un paysage sonore immaculé. Les lueurs tristes de la 27e lui font écho. A plusieurs reprises, des respirations marquées se font entendre et donnent la sensation de cristalliser l'instant dans le silence pour mieux l'éprouver.

Nous n'avions pas entendu ce couplage magnifique depuis l'incontournable version de Grimaud/Ashkenazy et même si les références sont légion pour le concerto, il s'agit d'un disque agréable qui mérite une écoute attentive.

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